lundi 31 mars 2025

L'Essence des Sens : chapitre 40

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le quarantième. 

40. Le jeu des pyramides 

En reprenant connaissance, Shaella réalisa que son nanite était encore fonctionnel. Conçu pour résister à des décharges électriques, il avait donc passé l’épreuve avec brio. Elle sut qu’elle avait été droguée, de même que ses compagnons, eux aussi transportés sur les épaules de Zayborgs — ses membres refusaient de lui répondre. Décidée à masquer les rares atouts dont elle pouvait disposer aux yeux de l’ennemi, elle choisit de ne pas se servir de son augmentation pour essayer de reprendre le contrôle sur son corps. Son nanite lui apprit tout de même que Fal n’était pas dans leur groupe. 

Au moment où une porte glissait pour leur livrer le passage, Shaella redressa la tête et aperçut Jaynak et Naldeia. Eux aussi avaient repris conscience, mais ne paraissaient pas plus maîtres de leurs mouvements. Dans la salle spacieuse où ils venaient d’entrer, des icônes en langage ektrim flottaient au-dessus de consoles opérées par des individus longilignes, au crâne oblong, dont les doigts interminables s’agitaient comme au ralenti. Coincée sur l’épaule de son porteur, il était difficile à Shaella de se faire une idée de ses environs. Ce ne fut que lorsqu’on la plaça dans un champ de stase à l’avant de la pièce, en face de baies panoramiques donnant sur l’hyperespace, qu’elle réalisa être dans la salle de commande du vaisseau — aux premières loges. Ses compagnons furent installés sur des dispositifs similaires, six autres humains et deux Nadariens. Le champ permettait de tourner la tête, mais bras et jambes, soulevés en l’air, ne bénéficiaient que d’une mobilité limitée. Shaella connaissait le principe de ce type de technologie. Elle savait que toute tentative pour forcer le champ entraînerait une immobilisation totale. Pour couronner le tout, la moindre utilisation de son nanite serait aussitôt repérée. 

Les tachyons qui environnaient Shaella avaient de quoi donner le tournis. De toutes les couleurs du spectre lumineux, ils déferlaient sans répit comme s’ils avaient pour but de vous engloutir dans leur tourbillon chromatique. Ils disparurent d’un seul coup, remplacés par une lueur blanche qui aurait été aveuglante sans la polarisation automatique des parois de vitriglass. Celles-ci permettaient de distinguer des secteurs plus foncés. L’éclat ardent emplissait l’intégralité des baies devant Shaella. 

Shaella savait n’avoir été inconsciente que pendant une période relativement courte. Comme la plupart des bâtiments d’un gabarit similaire, le croiseur ektrim était capable de recourir à des sauts en hyperespace par lui-même, sans passer par un Relais d’Accélération. La portée de ces sauts était cependant plus limitée. 

Ce qu’elle avait sous les yeux ne pouvait donc être qu’Altanis. On pouvait presque deviner les réactions nucléaires se produisant sur l’étoile du secteur, tant elle était proche, à présent. La température de la pièce, pourtant, demeurait stable autant que Shaella put en juger. Elle percevait l’écho de conversations et des cliquetis. Les voix étaient celles d’Ektrims, à l’exception de feulements indiscutablement fengiriens. 

Les membres du commando de l’Angle M, quant à eux, restaient muets, respectant les consignes à observer dans ce cas de figure. Jaynak et Naldeia ne disaient mot eux non plus, apparemment écrasés par la situation. On ne pouvait le leur reprocher — la présence si proche de l’étoile du système des Nadariens était de mauvais augure. 

Un double bruit de pas se fit entendre, l’un mat et distinct, l’autre étouffé. Drapé dans une toge semi-transparente laissant apercevoir les courants électriques qui le traversaient, l’Ektrim avait de petits yeux emplis de malice enfoncés dans leurs orbites. La peau de son visage était lisse, cependant sa manière de se mouvoir, ainsi que l’expérience au fond de ses yeux auguraient le grand âge. Ce liseré rouge autour du col le désignait comme commandant du vaisseau. Shaella ne fit qu’entrevoir le Fengirien qui l’accompagnait, lequel restait en retrait. L’Ektrim passa devant chacun des champs de stase et dévisagea les prisonniers tour à tour. Nul indice extérieur n’indiquait le rang de Shaella, et pourtant, ce fut en la scrutant du regard qu’il prit la parole. 

« Heureux de voir que vous avez tous repris conscience », fit l’Ektrim. Sa voix avait la propriété perturbante d’être à la fois haut perchée et de s’insinuer dans les oreilles, comme si elle provoquait un écho, ou comme si elle provenait de plusieurs endroits en même temps. « La Confédération des Planètes Unies a eu tort d’aller fourrer son sale nez dans des affaires qui ne la concernent en rien. » L’individu se déplaça jusqu’à se mettre en face de Naldeia et Jaynak. « Quant aux Nadariens, ils n’ont, pour utiliser l’une de vos pittoresques formules humaines, rien compris au film. Ils n’ont pas saisi qu’ils n’existeraient déjà plus s’ils n’avaient pas intégré l’Expansion, jadis. Nos alliés les Fengirs voulaient les anéantir. Dans sa grande mansuétude, l’Assemblée galactique ektrim en a décidé autrement.

 – Afin de nous réduire en esclavage, lâcha Jaynak entre ses dents. 

– Les esclaves connaissent leur statut. Nous vous avons offert bien mieux. Nous vous avons offert l’illusion de la liberté. Mieux encore — nous vous avons offert la possibilité de donner votre vie pour une cause qui vous dépasse largement, celle de l’Expansion. » L’Ektrim pivota pour s’avancer à grands pas vers Shaella. Le Fengir à la fourrure rousse observait son manège les bras croisés, imperturbable. « Et quant à vous, reprit l’Ektrim, la pitoyable tentative de votre minable organisation n’aura servi qu’à faire troquer aux Nadariens une illusion contre une autre. Vous les avez plongés dans la chimère de la rébellion. Quand bien même aucune rébellion n’était possible. Comme vous allez en avoir l’éclatante démonstration, les Ektrims ont toujours le dernier mot. » Le commandant de vaisseau désignait l’extérieur de l’une de ses serres. Le ricanement qui s’échappa des minces lèvres, presque translucides, était si aigu qu’il vrillait le cerveau — une série d’électrochocs aurait eu un effet similaire. 

Shaella ne cilla pas. 

« Regardez cela ! fit l’Ektrim. Et ceci ! » Successivement, il pointa l’un de ses longs doigts crochus en direction des baies à bâbord et tribord, vers ce qui pouvait figurer une paire de pyramides d’obsidienne en position horizontale. Soudain, l’individu dégingandé se figea et prit une inspiration. Ses pupilles atteignirent la fixité de celui qui regarde vers l’intérieur. Les pyramides se détachèrent alors du vaisseau et s’éloignèrent l’une de l’autre, s’orientant sur Altanis. Shaella devinait que l’Ektrim venait d’en donner l’ordre en passant par une augmentation cérébrale. « Un seul double tir de ces fabuleuses pointes d’antimatière, expliqua le commandant, suffirait à ravager la moitié de Nadar. Ce n’est pourtant pas ce qu’elles vont faire. » Il y avait indiscutablement une lueur de folie dans le regard qu’il jeta à Shaella. « Les explosions que ces pointes vont provoquer à la surface d’Altanis ne permettront bien sûr pas de détruire l’étoile. En revanche, les réactions en chaîne vont créer une tâche stellaire de nature à augmenter la température de l’atmosphère de Nadar de 20 degrés. Dans les cinquante prochaines années, l’évaporation va générer un effet de serre qui recouvrira Nadar comme une cloche. Le prodigieux effet d’emballement augmentera cette fois la température de surface de 100 degrés. L’effet est irréversible. Nul de vos nouveaux petits alliés ne pourra y survivre, humaine. Une mort soudaine aurait été bien trop douce, vous comprenez. On ne quitte pas l’Expansion sans conséquence. » 

Un nouveau ricanement monstrueux s’éleva dans la salle de commande du croiseur. 

*** 

Belganov savait avoir pris un vrai risque en sautant aussi près de l’étoile de Nadar. Mais que pouvait-il faire d’autre ? Le récit de Balchak l’avait convaincu que l’avenir de son peuple était en jeu. Le croiseur possédait plusieurs heures d’avance, que l’on ne pouvait regagner qu’en faisant un pari avec le destin. Le Coordonnateur des Nadariens disposait cependant d’un atout — son croiseur comme les deux destroyers venaient d’être construits et étaient tous trois équipés de la dernière génération de réacteurs antigrav et d’impulsion. En contrepartie, les vaisseaux n’avaient pas encore fait leurs preuves au combat. 

Dès la sortie de l’hyperespace, les signaux d’alarme de la salle des machines retentirent dans Le Réfractaire — le patronyme du croiseur, récemment renommé. Le voyant orange du système de survie se mit lui aussi à clignoter, alertant sur une prochaine défaillance possible. L’intolérable chaleur en provenance de l’étoile Altanis saturait les dispositifs de captation d’énergie et de retransmission au vaisseau, et les boucliers déflecteurs étaient sursollicités. Belganov fut néanmoins soulagé de constater que les deux destroyers en avaient également réchappé. L’Adepte-technicien de la salle des machines vint prévenir que tous les systèmes étaient au maximum de leur capacité, mais ne pourraient sans doute pas tenir bien longtemps. Belganov se concentra sur les signaux des stations de protection. 

« Par les démons des strates ! marmonna-t-il. » 

Balchak, qui avait eu le temps de le rejoindre, lui lança un regard inquiet. 

Belganov effleura une icône de sa console, et les hologrammes de deux pyramides autopropulsées, se détachant sur la blancheur aveuglante d’Altanis, apparurent. « D’après les données en provenance des stations de protection, corroborées par l’Intelligence Synthétique du vaisseau, nous avons là deux projecteurs d’antimatière. Il y a 99 % de chance que ce soit le moyen par lequel les Ektrims entendent éradiquer notre civilisation. 

– Ces espèces de pyramides seraient suffisantes pour détruire votre étoile ? » Balchak ne masquait pas son scepticisme. 

– Non, bien sûr. Mais l’explosion d’antimatière serait assez puissante pour l’agacer et déclencher sa colère. Il en résulterait une hausse de température dans tout le système, qui nous serait fatale sur le moyen terme. » Belganov avait les yeux dans le vague, et Balchak ne douta pas qu’il avait eu recours à son augmentation pour effectuer ses calculs et formuler sa prédiction. Belganov secoua la tête. « Nous sommes mal placés pour intercepter ces projecteurs. Et les stations de protection ne peuvent pas intervenir, en raison du saut en hyperespace de l’Ektrim, qui l’a mis hors de portée. 

– Voilà qui semble très mal engagé. 

– En revanche, poursuivit Belganov sans relever la remarque, nos destroyers sont chacun en situation de pouvoir intercepter l’un de ces projecteurs. Et Le Réfractaire est bien placé pour s’occuper du croiseur ennemi. » 

Belganov donna ses ordres. Les deux destroyers se détachèrent pour se diriger chacun vers l’une des pyramides. La salle des machines reçut pour instruction de mettre les réacteurs antigrav en surrégime. Lentement au début, puis avec une vitesse croissante, le croiseur s’arracha à l’effarante gravité d’Altanis. 

« Nous serons à portée de tir du croiseur ennemi dans trois minutes », annonça l’Adepte en charge des systèmes de combat. 

Le voyant orange des systèmes de survie repassa au vert, signe qu’ils s’étaient suffisamment éloignés de la couronne d’Altanis. La lueur bleutée dans les yeux de Belganov s’agrandit. Une nuée de Zarins, chasseurs pilotés par les Zayborgs, venait de surgir des entrailles du croiseur. « Comment pourront-ils échapper à l’attraction d’Altanis ? s’interrogea-t-il. 

– Ils ne pourront pas, dit Balchak. Aussi près de la couronne de l’étoile, des vaisseaux de cette taille ne sont pas équipés pour. Le seul moyen pour eux de survivre serait que le croiseur ektrim accélère pour se positionner sur leur trajectoire et les récupérer. Mais il ne le fera pas. Ces Zarins ne sont qu’une distraction, visant à donner l’occasion à ce satané croiseur de s’enfuir. Je suggère de modifier légèrement votre trajectoire d’interception afin de les éviter, mais de garder vos propres chasseurs bien à l’abri. » 

L’Adepte de la sécurité devait posséder un traducteur simultané, car il se mit à protester auprès de Belganov. Celui-ci savait que nulle hésitation n’était permise à ce stade. Il décida de se fier à son intuition. 

« Calcul d’une nouvelle trajectoire d’interception, dit Belganov. Préparez les systèmes défensifs et offensifs. » Son augmentation lui suggérait différentes possibilités d’attaque contre ce type de croiseur. Il choisit d’alterner lancement de missiles et de torpilles tout en ciblant l’ennemi à l’aide des canons lasers et à protons. L’attaque devrait être dévastatrice, la plus brève possible. 

Les Zarins s’efforcèrent de corriger leur trajectoire pour intercepter le croiseur. Trop forte, la gravité de l’étoile du système ne l’autorisa pas. Leurs tirs de torpilles et leurs lasers manquèrent Le Réfractaire ou s’écrasèrent sur ses boucliers. Comme l’avait prédit Balchak, les chasseurs légers continuèrent leur course en direction d’Altanis, sans parvenir à faire demi-tour. 

Le croiseur ennemi, en revanche, fit feu de toutes ses pièces. Belganov fut contraint de modifier son champ de déflexion, lequel ne protégea plus aussi bien le vaisseau contre le rayonnement d’Altanis. Le Réfractaire fut très vite secoué, et l’on signala des dégâts au niveau de la poupe. Le croiseur ektrim, quant à lui, avait survécu aux différents projectiles. Son propre bouclier luisait sous les tirs, mais tenait bon. Il lâcha soudain un éclair bleuté, qui illumina la salle de commande, mais ne parvint pas à franchir les défenses du Réfractaire. 

« Les boucliers ne sont plus qu’à 30 %, signala l’Adepte chargé des systèmes défensifs. Nous ne pourrons plus résister bien longtemps à ce rythme. 

– C’est pourtant ce que nous devons faire, dit Belganov. 

– L’Eclat d’Alcor pourrait vous venir en aide, suggéra Balchak. 

– Ce serait du suicide. Ce qui est valable pour les Zarins l’est aussi pour vous, mon cher. » 

Belganov décida de poursuivre les attaques sans relâche. Il savait être désavantagé en raison de sa proximité plus grande avec Altanis, laquelle avait affaibli ses boucliers. Néanmoins, il devait se raccrocher à l’idée de finir par trouver une faille dans la cuirasse. Les explosions retentissaient de manière de plus en plus violente dans le croiseur. 

« Nous avons perdu tous les canons à protons à tribord, et tous les lasers sauf un », annonça un Adepte. 

– Boucliers à 10 %. » 

La projection holo du croiseur ennemi, dont les boucliers s’étaient affaiblis sérieusement, révélait que ces derniers ne recevaient presque plus d’impacts. Belganov se dit qu’au prochain tir adverse, leur propre vaisseau ne pourrait plus résister à l’éclat d’Altanis. La partie était jouée, et ils avaient perdu. Il serra les dents, attendant l’impact fatal. 

De violents éclats de lumière entourèrent le croiseur ektrim. Ses boucliers devinrent rouge cramoisi, puis une explosion se forma sur la partie sphérique de sa superstructure. Les courants bleutés qui parcouraient le croiseur n’étaient presque plus visibles. L’un des Adeptes signala que l’ennemi avait perdu ses boucliers, son système de distorsion et la majeure partie de sa puissance en impulsion. Belganov consulta ses détecteurs, et s’aperçut que les deux croiseurs l’avaient finalement rejoint. C’étaient eux qui concentraient leur tir sur l’ennemi, désormais privé de boucliers. 

« Cessez le feu ! ordonna-t-il. Abordage simultané en ventral et en dorsal. Commandants de destroyers au rapport. 

– Cible détruite, fit l’un. 

– Cible détruite », fit l’autre. 

Un irrépressible tremblement saisit Belganov, qui se serait écroulé si Balchak n’avait eu le réflexe de le soutenir. La tension nerveuse avait été terrifiante. Belganov ne réalisa pleinement la portée de l’exploit qu’en recevant une double transmission qui montrait les explosions de plasma englober les sombres pyramides. Selon ses commandants, aucun des deux projecteurs d’antimatière n’avait eu le temps de tirer sur l’étoile. 

Shaella prit conscience que l’éclat des boucliers déflecteurs avait viré au rouge grenat. C’était la fin des haricots pour le croiseur ektrim, mais aussi pour tous ses occupants. Une vague d’énergie succéda à cette constatation, déferlant dans la salle, et Shaella sut que les systèmes gravimétriques avaient connu une défaillance en voyant voler plusieurs ektrims, qui allèrent se fracasser contre les parois. Elle se demanda pourquoi elle et ses compagnons n’avaient pas subi le même sort. Différentes alertes stridentes retentissaient au moment où le champ de stase, qui leur avait sauvé la vie, n’étant plus alimenté, libéra l’équipage du Croc de Shaenor. Hébétés, les compagnons s’entreregardèrent. Ils semblaient tous aller bien, y compris Jaynak et Naldeia, qui tombèrent dans les bras l’un de l’autre. 

La salle de commandement était sens dessus dessous. Le sang bleu sombre d’Ektrims maculait les parois, on retrouvait ça et là des membres ou autres composants de droïdes ou d’appareils divers. Un grognement masqua un instant le bruit des sirènes. Une fourrure rousse se détacha de l’une des baies de vitriglass où la silhouette laissa des traces écarlates mêlées à des poils. L’un des yeux du Fengir avait éclaté dans son orbite, tandis que le second était fixé sur Shaella. Le leader fengirien ne réussit pas à sortir toutes les griffes de ses quatre mains, mais il trouva suffisamment d’équilibre pour se mettre en position et bondir. 

Shaella activa aussitôt le mode combat de son augmentation neuronale. Les derniers restes de drogue qui n’avaient pas été balayés par l’afflux d’adrénaline le furent sous l’effet des courants issus de ses neurones, reliés à ses modifications sur chaque membre. Elle évita avec une vivacité surhumaine les griffes ennemies, se déporta de côté et enchaîna avec un violent coup de pied dirigé sur la carotide de son adversaire. Le Fengir se rejeta en arrière, sonné. L’afflux sanguin n’avait été interrompu que brièvement cependant, et l’ennemi devait bénéficier de ses propres améliorations. 

Un bras nadarien s’enroula autour du cou recouvert de fourrure. Une main se plaqua sur la pommette. Il y eut un craquement quand Jaynak, d’une torsion soudaine, brisa les cervicales du Fengir. Le colossal corps roux retomba au sol. Il y tressauta quelques instants comme s’il essayait de ramper, avant de s’immobiliser définitivement. 

Shaella n’eut pas le temps de remercier ou de féliciter Jaynak. Un premier choc retentit, qui projeta tout le monde au sol. Puis un second, qui souleva humains comme Nadariens. 

« On dirait bien que le croiseur vient d’être abordé », dit-elle. 

Elle se dirigea vers ce qu’elle devinait être la console de commandement principal. Le modèle fut heureusement reconnu par ses bases de données, et elle commença aussitôt à le pirater. Il était temps — l’IS du vaisseau ayant détecté la mort de l’Ektrim qui commandait le croiseur, cherchait à déclencher l’autodestruction. Seuls les dégâts subis l’avaient empêché jusqu’à présent d’entamer la réaction finale. Une partie du vaisseau avait été exposé au vide stellaire, mais les systèmes automatiques avaient procédé avec succès au confinement d’urgence. L’explosion qui avait provoqué cela était selon toute évidence responsable de la défaillance des systèmes gravimétriques, tout comme de la vague d’énergie à laquelle ils devaient la mort de leurs ravisseurs. 

Shaella s’efforça de couper les entrées à l’IS menant au réseau énergétique. Elle téléchargea ensuite un plan du vaisseau, avec l’endroit où Fal était gardé prisonnier. 

Le temps que son équipage et elle se mettent à parcourir les coursives, des combats s’étaient déclenchés. Les drones et droïdes nadariens s’avéraient cependant plus nombreux et en meilleur état que leurs adversaires. Rares étaient quant à eux les Zayborgs et Fengirs à avoir survécu. Quand un commando nadarien intercepta Shaella et ses hommes, elle communiqua au Guide les données concernant Fal. Le Nadarien chercha à la convaincre d’évacuer aussitôt, mais céda devant sa détermination. 

Les droïdes qui se trouvaient dans la même pièce que Fal avaient tous été vaincus au combat. L’androïde n’en était cependant pas responsable puisqu’il portait toujours son verrou de contention. Ils transportèrent Fal en attendant de pouvoir s’attaquer à cette technologie exotique. 

Des dispositifs antigrav les soulevèrent jusqu’à l’un des destroyers qui avaient pris le croiseur en sandwich. Le Réfractaire était le plus endommagé des bâtiments alliés. Il parvint malgré tout à accompagner les deux destroyers, et d’un commun effort, les trois vaisseaux s’arrachèrent une nouvelle fois à la gravitation d’Altanis. 

Derrière eux, une explosion finale engloutit le croiseur ektrim.

Et pour la première fois, le résumé de ce chapitre, commenté par deux voix de l'IA en anglais : absolument BLUFFANT! 


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Retrouvez les cinq premiers chapitres en cliquant sur ce lien.

 

mercredi 26 mars 2025

My Audiobooks in English

The virtual narration implemented by Amazon's Audible, with the help of AI, now enables me to offer you my English-language books in audio version. The quality of the narration is quite astonishing, without which I wouldn't have taken this step. 

Fantasy : 

The Ardalia Trilogy

 

The Breath of Aoles (Ardalia, volume 1)


Turquoise Water (Ardalia volume 2) 

The Flames of the Immolated (Ardalia, volume 3)

A brief history of Ardalia

 

Thriller : 

The New Guardians


My thoughts about AI: In this particular case, you can't blame the AI for stealing the work from English-speaking actors, because I don't have the money to hire them for these conversions. In other words, without AI, there simply wouldn't have been an audio version.
It's a different story, of course, when it comes to the cover design of my books, where I always give priority to the human touch.

And what about the people who could afford to hire actors, and who are now going to opt for AI?

On the contrary, they may tend to do so even more, in order to differentiate themselves from those who use AI voices that recur too often.  

What's really important, I think, is that works that would never have existed in audio will be able to exist, thanks to AI. 

As for the quality check, do not hesitate to make use of the virtual voice sample below the images of the amazon links.

lundi 24 mars 2025

L'Essence des Sens : chapitre 39

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le trente-neuvième.

39. Le proverbial grain de sable 

La communication hyperluminique avait été rassurante — Merek allait bien. Installé dans son siège gravifique du Croc de Shaenor, Jaynak poussa un soupir de contentement. Son frère, comme les autres pilotes dont les nanites ektrim venaient d’être neutralisés, se trouvait surveillé par des drones SR dans une salle commune du Strator. Tant qu’ils ne seraient pas revenus sur Nadar pour communier avec l’argelen, et aussi longtemps que leurs réactions aux informations concernant le passé n’auraient pas été évaluées, ils demeureraient suspects. Jaynak fit un vœu pour que son frère accepte au plus vite la nouvelle réalité des choses. L’Expansion ne voudrait à aucun prix laisser la situation en l’état, et bien vite, Nadar allait devoir présenter un front uni contre ses anciens alliés. Des pilotes comme Merek seraient alors d’un intérêt vital pour la défense de leur civilisation. 

Jaynak activa la vue arrière sur la console attachée au dossier devant lui. Le Croc de Shaenor s’éloignait de l’un des grands chantiers spatiaux en orbite autour de la verte Nadar. L’on y distinguait deux imposants destroyers dans leur dernière phase d’achèvement. Ils n’avaient pas pu participer à l’invasion d’Oblan, mais sauf très mauvaise surprise, seraient fin prêts pour repousser toute menace en provenance de l’Expansion. Jaynak se tourna vers Naldeia et posa sa main dans la sienne. Elle lui sourit. 

Soudain, le visage aux veines saillantes de Balchak apparut au-dessus de la console de communication du poste de pilotage. 

« Je viens d’acquérir votre signal, dit le Quantorien. Je vous suis en mode occulté. 

– Bien compris, fit Shaella. Silence radio jusqu’à nouvel ordre. » 

Un signal lumineux lui répondit. 

A l’instar des humains et de sa compagne, Jaynak prit le parti de se détendre. Il leur restait plusieurs heures avant de rallier le point de rendez-vous au milieu du système, où ils feraient leur jonction avec la flotte de retour d’Ixion. C’est là que lui et Naldeia se sépareraient. Jaynak avait pour mission de donner des conférences aux anciens Fervents pour leur expliquer son parcours et les convaincre de faire cause commune avec les Réfractaires. Naldeia, quant à elle, rejoindrait en compagnie de Shaella et de Balchak le Rapier dans le système Estregor. Là, elle jouerait le rôle d’intermédiaire entre le commandement suprême de la Confédération des Planètes Unies, le commandant Telnov, qui venait d’être promu Coordonnateur de la flotte nadarienne, et le professeur Belganov. Sa tâche serait à n’en pas douter écrasante. La savoir entre les mains de Shaella McGinnis était tout de même rassurant. La commandante humaine avait prouvé son niveau de compétence depuis qu’ils l’avaient rencontrée. Shaella n’agissait bien sûr pas de manière désintéressée, mais si elle avait partagé la mentalité des Fengirs, des Ektrims ou des Zayborgs, elle ne se serait pas préoccupée du sort des Nadariens après les avoir retournés contre leurs anciens alliés. 

Elle lui faisait penser à une chirurgienne qui aurait retiré le caillot empêchant la libre circulation du sang — grâce à elle Nadar avait une chance de retrouver sa vitalité. 

La planète verte n’était plus qu’un point brillant derrière eux depuis quelque temps déjà quand Fal annonça la désoccultation. L’utilisation du dispositif de furtivité était gourmande en ressources. Il fallait le préserver en vue du passage du Relais d’Accélération, après le rendez-vous avec la flotte. 

Jaynak demanda à sa console l’accès en tant qu’observateur aux détecteurs courte portée. Balchak était toujours occulté, sans doute parce qu’il avait eu tout loisir d’amasser des réserves d’énergie pendant son orbite autour de Nadar. Un nouveau point se matérialisa subitement, étonnamment proche. 

 « Holoproj », ordonna Shaella. 

Le bâtiment qui venait de surgir était de classe croiseur. Formé d’une impressionnante demi-sphère parcourue de courants bleutés partant de la poupe pour se rétrécir et s’étirer à partir du milieu, il était doté d’une double proue pyramidale à laquelle il fallait ajouter la baie de commandement central. Le vaisseau portait sans aucun doute la signature des Ektrims. On ne devinait la présence des pyramides en proue que parce qu’elles se détachaient sur fond de nébuleuse. 

« Il est à double générateur d’antimatière, dit Shaella sans s’adresser à quiconque. Un modèle très rare. » La tension dans sa voix, bien que perceptible, était maîtrisée. 

« Il est positionné sur un vecteur d’interception, annonça Fal. 

– Il devait s’être occulté pour s’être autant approché sans apparaître sur les détecteurs, commenta Naldeia. 

– Je prends les commandes en mode synaptique, dit Shaella. Tenez-vous bien, ça va secouer. Contactez la flotte Nadarienne. 

– Impossible, lui répondit l’officier en charge de la communication. L’ennemi brouille nos signaux. » 

Le Croc de Shaenor se mit à zigzaguer follement. Jaynak, qui surveillait les détecteurs, n’aperçut pas la signature de L’Eclat d’Alcor, de Balchak. Le Quantorien patientait peut-être dans l’ombre, attendant le moment décisif pour frapper. Quoiqu’il en fût, tandis que Shaella multipliait les manœuvres évasives, le respect que Jaynak nourrissait à l’égard des humains s’accrut. Même lui, dont le corps était habitué à gérer des gravités différentes, avait le tournis. 

Le transporteur s’était rapproché autant qu’il le pouvait du croiseur ektrim. Shaella commanda simultanément le largage des deux missiles et de la paire de torpilles qui constituaient les seules armes du vaisseau. 

Quatre éclairs jaillirent en courte succession du croiseur. Missiles et torpilles explosèrent dans le silence de l’espace avant d’avoir atteint leur objectif. Le Croc de Shaenor subit une série de secousses. Jaynak sentit la main de Naldeia se refermer sur la sienne et la serrer. Pour la première fois, il réalisa la gravité de la situation. 

Un éclair puissant frappa tout à coup le vaisseau. Le bouclier du simple transporteur fengirien s’avéra bien trop frêle pour y résister — humains comme Nadariens furent plongés dans l’inconscience. Fal, quant à lui, se mit en semi-veille afin de limiter les dégâts. 


Balchak R’stog ne pouvait se départir d’une certaine admiration pour la commandante McGinnis. Son vaisseau, le Diligent, était une merveille de technologie. Pourtant, elle n’avait pas hésité à le délaisser pour emprunter un transporteur fengirien, certes trafiqué et amélioré, mais beaucoup moins performant. Il aurait adoré partager avec elle les risques insensés de sa mission sur Nadar. Il y avait là de quoi réveiller les sensations du phar’thal, le rituel de protection qu’il avait subi à l’adolescence, et qui resterait à jamais associé pour lui à la notion de danger mortel. S’adapter à une planète inconnue, s’infiltrer dans ses bases les plus névralgiques, agir de manière à déstabiliser tout un régime sans pourtant laisser la moindre trace. Etre, en somme, le proverbial grain de sable qui fait dérailler toute la machine… le rêve de tout espion porté sur l’action. 

Shaella ne lui faisait pas assez confiance pour l’inclure dans l’équipe, et il se voyait relégué à une simple mission d’escorte. Autant dire qu’il faisait de la figuration. Il pouvait la comprendre, bien sûr. Ils étaient de deux bords différents sur l’échiquier galactique. Elle ne connaissait rien à ses talents et ne se fiait à lui que dans la mesure où elle avait dû deviner qu’il ne ferait rien pour désappointer Lucinda. Lui permettre d’opérer à partir de L’Eclat d’Alcor était déjà, du point de vue de Shaella, un signe positif. 

Balchak était déterminé à ne pas se contenter de faire le boulot, mais à accomplir sa tâche de manière aussi scrupuleuse qu’il le pouvait. Il était certain de n’avoir été repéré par personne depuis leur incursion dans le système d’Altanis. Contrairement au Croc de Shaenor, il pourrait sans doute se maintenir en mode occulté jusqu’à la rencontre avec la flotte de Nadar. Il n’aurait ensuite qu’à laisser son dispositif d’occultation se recharger jusqu’au moment d’atteindre le Relais d’Accélération vers Estregor. 

Le point qui apparut tout à coup sur ses détecteurs courte portée fit frémir les poils de sa barbe, comme à chaque fois qu’il était confronté à l’inattendu. En la matière, il était servi, songea-t-il en prenant connaissance aussitôt, par le biais de son augmentation cérébrale, des caractéristiques du nouveau venu — un croiseur Ektrim non répertorié sur sa base de données, rien de moins ! Balchak eut l’idée de se placer dans les six heures du vaisseau ennemi pour l’attaquer par-derrière dans l’espoir de désactiver ses boucliers et même de toucher son système de distorsion. 

« Pure folie », grommela-t-il. Le croiseur menait une attaque-surprise et avait donc tous ses boucliers levés — Balchak n’avait aucune chance. Formé à prendre des décisions rapides, il eut un dernier regard pour le frêle transporteur de Shaella qui s’était désespérément lancé dans une série de virages serrés et, mâchoire crispée, fit demi-tour. Impossible d’où il était d’essayer de rallier la flotte, le croiseur lui barrant le passage. Le mieux était encore de revenir vers Nadar à vitesse maximale d’impulsion et de se rappeler au bon souvenir du professeur Belganov. Heureusement, la commandante Shaella lui avait fourni les coordonnées hypraluminiques qui lui permettraient de le joindre — dès qu’il serait suffisamment éloigné du croiseur ektrim, bien entendu. 

Balchak poussa un soupir de soulagement en s’apercevant que le vaisseau ennemi ne l’avait pas pris en chasse. Obnubilé par sa proie, il n’avait pas songé qu’un autre appareil occulté pouvait se trouver sur place. 

Nadar avait grossi sur l’écran de visualisation, et plusieurs heures s’étaient écoulées quand Balchak estima pouvoir courir le risque de contacter Belganov. L’Eclat d’Alcor naviguait depuis peu en toute visibilité, ayant épuisé ses réserves. A la surprise de Balchak, le visage du professeur apparut dans son cockpit avant même qu’il ne cherche à le joindre. Dans la même fraction de seconde, l’augmentation de Balchak lui signala la présence de deux destroyers et d’un croiseur se dirigeant droit sur lui. 

« Balchak R’stog, fit le professeur de sa voix grave, que fait L’Eclat d’Alcor dans les parages ? 

– J’étais chargé d’escorter le vaisseau du commandant McGinnis, dit Balchak, jusqu’au moment où un croiseur ektrim est apparu. » 

L’éclat bleuté émanant des yeux du professeur se fit plus ardent. « Ma prémonition s’est donc révélée exacte. La menace qu’a fait peser l’ennemi si tôt après le départ de Naldeia et Jaynak m’a incité à penser qu’ils couraient un danger. Et ils ne sont pas les seuls, j’en ai peur. Qu’est-il arrivé au Croc de Shaenor ? 

– Désolé, mais je l’ignore. J’ai préféré désactiver mes détecteurs pour éviter qu’ils ne trahissent ma présence. Je vous envoie les coordonnées de la rencontre. » 

Belganov mit fin à la communication dès qu’il eut l’information. Balchak se rapprocha du croiseur, jusqu’à évoluer dans son sillage. Il était sur le point de rappeler le professeur quand celui-ci le devança une nouvelle fois. 

« J’ai interrogé les stations de protection d’Altanis », dit Belganov. Balchak hocha la tête. Les soleils de chaque système pouvant constituer des points de vulnérabilité aussi bien que les planètes elles-mêmes, des stations de protection étaient parfois disposées afin de contrer une éventuelle menace. 

« Deux d’entre elles m’ont signalé des fluctuations de neutrinos qui pourraient correspondre à un croiseur occulté. Les données de navigation de ce supposé croiseur sont cohérentes avec le temps qu’il lui aurait fallu pour rejoindre l’endroit à partir de la zone où vous-même l’avez rencontré. Malheureusement, la trajectoire que suit ce croiseur va le mettre hors de portée de nos stations. 

– Ce qui signifie ? 

– Notre croiseur et nos destroyers ont des capacités de distorsion limitées sans avoir recours à un quelconque Relais d’Accélération. Si vous êtes volontaire pour une mission à haut risque, vous avez trois minutes pour vous arrimer dans notre hangar. Nous allons effectuer un saut au plus près de notre étoile. » 

*** 

Le rayon tracteur attira le Croc de Shaenor au travers de l’un des sas du croiseur ektrim. Pendant qu’il se maintenait dans son état de demi-veille, Fal lançait des simulations. Ignorant les effectifs réels de l’ennemi, il se basait sur des chiffres standards pour des bâtiments du tonnage du croiseur. Ses chances de fuir ou de perturber les systèmes adverses s’avérant infimes, il décida de demeurer dans le même état jusqu’à nouvel ordre. Il était capable de sonder les lieux de manière très discrète afin de ne pas donner l’éveil — cela devrait lui suffire pour l’instant. 

Les systèmes de survie du vaisseau fonctionnaient encore. Ils étaient les mieux protégés, si bien que l’atmosphère restait propice aux occupants humains et nadariens, qui avaient survécu. Les compagnons de Fal, en revanche, ne feignaient pas leur inconscience. 

Le son d’un découpeur à plasma se fit entendre. La paroi ciblée tomba au sol. Un drone vint tout d’abord inspecter les lieux. Peu après, les Zayborgs apparurent. Ils portaient des combinaisons dont les lueurs bleutées les distinguaient en tant que garde prétorienne de l’Ektrim commandant le vaisseau. Leur crâne était aussi allongé que celui d’un Ektrim, mais plus lisse. Des éclats rougeoyants émanaient d’un œil sur deux, et leur queue pourvue d’une boule hérissée de pointes se balançait rythmiquement tandis qu’ils avançaient. Ils s’emparèrent des humains qu’ils prirent sans cérémonie sur leurs épaules. Fal, quant à lui, eut droit à un harnais de contention, lequel emprisonna ses drones et son torse. 

L’androïde ne fit pas un mouvement et se laissa transporter à son tour. Un Fengir commandait le détachement de Zayborgs. Les coursives du croiseur se succédaient. Fal fut séparé des humains, mais s’aperçut qu’on les conduisait dans une salle médicalisée. Lui-même échoua dans une pièce où figuraient une demi-douzaine de droïdes de sinistre allure — des gardes à la livrée noire, dont la taille amincie et les larges épaules donnaient l’impression d’une grande puissance physique. 

Fal fouilla ses archives, à la recherche d’une situation aussi compromise pour Shaella et son équipe. Il n’en trouva pas. 

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mercredi 19 mars 2025

Le plan complètement DINGUE d'Elon Musk

Chacun sait à présent que Donald Trump a abusé de son père Fred Trump, dans les années 90, au moment où son géniteur était victime d'un Alzheimer, pour lui soutirer sa fortune aux dépens des autres héritiers. Si vous ne me croyez pas, lisez à ce sujet Mary L. Trump, l'une des héritières spoliées. C'est en tenant compte de ce passé et en observant certains signes de sénilité précoce de Donald Trump qu'Elon Musk a conçu son plan diabolique. 

Interrogé au sujet de la maladie d'Alzheimer, Chat GPT nous apprend que certains gènes, comme APP, PSEN1 et PSEN2, sont impliqués dans des formes familiales précoces d'Alzheimer. Si l'un de vos proches a été victime d'Alzheimer avant 65 ans, alors le gène est sans doute présent dans votre famille, et vous-même avez une chance sur deux de développer la maladie. 

Fred Trump, né en 1905, n'a été diagnostiqué qu'en 1991, soit à l'âge de 86 ans. Son Alzheimer n'est donc pas génétique. 

Chat GPT nous dit en effet qu'il n'est pas nécessaire d'avoir les gènes pour en être victime. Au-delà de 80 ans, 1 personne sur 4 est concernée par la maladie, et après 85 ans, c'est plus d'1 personne sur 3. 

Il est possible qu'Elon Musk n'ait pas connu toutes les nuances liées à la maladie d'Alzheimer. Ou bien, il a tout simplement décidé, considérant les signes précoces de sénilité chez Donald Trump, qu'une chance sur trois ou quatre serait suffisante pour lui. 

Pourquoi n'avoir pas choisi Joe Biden, pourtant plus âgé? Parce que Musk a eu l'intuition que Trump serait plus crédule, plus facile à tromper. Par ailleurs, Musk était en désaccord frontal sur certains points avec Biden. Il lui aurait été infiniment plus difficile d'en devenir un proche.

Mais je brûle les étapes. Parlons tout d'abord de Neuralink, la société d'implants cérébraux de Musk. Cette compagnie s'est rendue célèbre en parvenant à faire jouer un tétraplégique à un jeu vidéo uniquement grâce à un dispositif relié aux synapses de son cerveau. 

Neuralink est la société qui a inspiré mon roman Memoria. Et, tant que vous y êtes, n'hésitez pas à vous plonger également dans la suite de Memoria, l'Essence des Sens. Fin de l'autopromo (il faut bien vivre).

Neuralink a notamment pour objectif futur de lutter contre les maladies neurodégénératives de type Alzheimer. En finançant sa campagne et en l'aidant très activement à se faire élire, Musk a pu se rapprocher physiquement de Donald Trump. On le voit d'ailleurs souvent à Mar-a-Lago. 

Musk est dans une position idéale d'observateur. Il sera ainsi à même de détecter les premiers signes d'Alzheimer chez Trump, lequel aura 80 ans en juin 2026. Dès que ce dernier sera diagnostiqué, fort de sa complicité avec Trump, Musk va lui proposer de se faire opérer et de se faire greffer une puce Neuralink, afin de vaincre Alzheimer. 

Imaginez le coup de pub : Neuralink guérit d'Alzheimer le président en exercice des Etats-Unis. Gigantesque. 

Musk agit comme l'entrepreneur qui va placer son argent dans une start-up prometteuse, en attendant qu'elle perce. Sa start-up, c'est Trump.

C'est pourquoi Musk va tout faire pour que Trump aille au-delà de son second mandat, au cas où Alzheimer se déclarerait plus tardivement chez son futur patient. 

Bien évidemment, Neuralink n'est pas du tout en mesure de lutter contre Alzheimer pour le moment. Il est tout à fait possible que ça n'arrive jamais du vivant de Musk. Mais l'optimisme de Musk est légendaire. C'est un optimisme qui va bien souvent très au-delà de la lucidité. Un optimisme délirant.

Vous voyez comment toutes les pièces du puzzle sont en place?

Je trouverais, pour ma part, d'une ironie assez incroyable que celui qui a abusé son père devienne le sujet expérimental, le Frankenstein du docteur Mabuse de ce siècle.

Autres articles sur le même sujet : 

- Elon Musk sans langue de bois

- Elon Musk et l'hyper agressivité

- Elon groks the fullness? 

- Comment Elon Musk est passé du côté obscur 



lundi 17 mars 2025

L'Essence des Sens : chapitre 38

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le trente-huitième.

38. En sous-sol

L’Ektrim possédait une cape dont le col à l’extrémité évasée lui encadrait le visage, qu’il avait osseux. Ses yeux étaient deux puits sans fond d’où pulsait une haine infinie. Les courants électriques parcourant sa peau nervurée se répandaient jusque sur la surface de sa cape aux motifs ondoyants. Là, ils gagnaient en intensité, comme un orage qui voyait soudain sa puissance décuplée et ne demandait qu’à laisser échapper l’un de ses éclairs dévastateurs. 

Belganov n’avait pris possession du Palais de la Première Strate que depuis une vingtaine d’heures, et la communication holographique était la première qu’il recevait en provenance d’un dirigeant étranger. 

« L’Exarque stellaire vous parle », dit l’Ektrim. Pénétrante, sa voix paraissait résonner dans plusieurs endroits de la pièce. Elle s’insinuait dans les oreilles comme un serpent vous entourant de ses anneaux pour faire de vous sa victime. « Je suis Than’Agh. En trahissant les Fengirs, vous vous êtes exclu de l’Expansion. Le traité qui nous liait est maintenant caduc. Votre peuple peut se réjouir d’avoir choisi le Coordonnateur qui va le mener à son anéantissement. Les jours de votre pitoyable civilisation sont comptés. » 

Belganov n’eut pas le temps de répondre — le dirigeant des Ektrims mit fin à la communication. L’Intelligence Synthétique au service du Premier Coordonnateur s’avéra impuissante à remonter à la source afin d’identifier l’origine de l’appel. Crypté au niveau quantique, celui-ci était intraçable. Une ombre passa sur le visage de Belganov, dont les traits ridés étaient plus creusés encore qu’à l’accoutumée. Ces derniers jours avaient été harassants. La nouvelle de la défaite de Grendchko et des Fengirs, et de la capture de la flotte entière de Nadar par les Réfractaires, avait bien sûr eu un formidable effet euphorisant. La succession de victoires sur Nadar rendait d’autant plus difficile de garder sa lucidité dans ces moments. Grâce à la prise du plus névralgique d’entre eux, les centres opérationnels des Fengirs étaient tombés les uns après les autres. La liesse le disputait parmi le peuple à un immense ébahissement. 

Tout cela était bien beau, mais depuis sa nomination en tant que Premier Coordonnateur par intérim, Belganov voyait les responsabilités s’entasser sur ses épaules comme autant de briques menaçant de l’enterrer pour de bon. Depuis qu’il était devenu le leader des Réfractaires, il s’était habitué à l’idée de devoir assumer des charges bien plus diverses que sa formation d’origine. Il s’était donc préparé de manière intensive, et son augmentation était une ressource précieuse — mais il y avait des limites. 

L’appel de l’Exarque venait le ramener à une réalité abrupte. Il eut une pensée inquiète pour Naldeia et Jaynak. Tous deux avaient embarqué dans le transporteur fengirien de la commandante Shaella McGinnis, de l’Angle M. Naldeia devait coordonner la flotte des Nadariens avec les forces de la Confédération des Planètes Unies, en prévision des représailles que l’Expansion ne manquerait pas d’exercer sur Nadar. Quant à Jaynak, inquiet pour son frère Merek, il comptait rallier au plus vite la flotte de retour du système d’Ixion. Belganov et Shaella avaient convenu de garder secret le rôle joué par l’Angle Mort dans les derniers événements — l’organisation tenait à sa clandestinité. 

En ce qui concernait la Confédération des Planètes Unies, une période de préparation du peuple était nécessaire pour annoncer l’alliance avec l’ennemi de naguère. 

Belganov se caressa le menton entre l’index et le pouce. Cet appel pouvait laisser entendre que les Ektrims surveillaient de beaucoup plus près Nadar qu’il ne l’avait cru, auquel cas… 

Une icône clignotante interrompit le cours de ses réflexions. Halnev, le Premier Guide Communiant, cherchait à le joindre. 

« Premier Coordonnateur, dit Halnev, dont l’hologramme se matérialisa devant Belganov, nous avons réussi à ouvrir l’accès aux sous-sols et à pénétrer dans un centre de contrôle indépendant du reste de la base. L’équipe spéciale d’intervention vient de le pirater. En ce moment même, notre IS récupère les secrets des entrailles de cette prétendue ambassade. 

– Très bien, j’arrive. » Belganov coupa la communication avant que Halnev ne puisse émettre d’objection. 

Dans le rapport qu’il avait envoyé, l’androïde Fal avait signalé l’existence de ces sous-sols. Il fallait cependant disposer d’une clé de décryptage ektrim pour y pénétrer, faute de quoi Fal avait indiqué une probabilité de 90 % pour que les sous-sols soient piégés et explosent. Avant de quitter la planète, Shaella et son équipe avaient fourni aux Réfractaires une série de clés ektrim connues de leurs services. Celles-ci devaient servir de base pour décrypter le verrou de l’ancienne ambassade fengirienne. Les principales Intelligences Synthétiques de Nadar avaient été mises à contribution pour résoudre le problème en douceur, et le succès était au rendez-vous. Aller sur place comprenait une part non négligeable de risque en cas de traquenard, néanmoins Belganov tenait absolument à découvrir l’endroit de ses propres yeux. Ce sous-sol allait peut-être devenir l’aboutissement de sa carrière — bien plus encore que son poste de Premier Coordonnateur par intérim. 

Il demanda à ce qu’on lui prépare son flotteur. Plusieurs drones l’accompagnèrent ainsi que deux gardes de sa sécurité personnelle. 

Après avoir vécu dans l’ombre pendant si longtemps, Belganov avait du mal à se faire au luxe de précautions dont il était entouré, davantage qu’à la majesté des lieux environnants. Il fallait par exemple que l’on vérifie systématiquement que ses moyens de locomotion n’aient pas été piégés, sans parler des encombrantes escortes permanentes, bien sûr. 

Un tripode le conduisit avec ses gardes à son flotteur, dont le cockpit était opaque de l’extérieur. Quatre autres engins identiques partirent en même temps que lui afin de déjouer un éventuel attentat sur sa personne. Le trajet fut bref. Depuis les airs, Belganov vit une foule de gens se presser à l’entrée du grand bâtiment rectangulaire. A présent que les Fengirs avaient été vaincus, la curiosité au sujet de l’ambassade si longtemps interdite était vive. Pour l’instant toutefois, Belganov faisait défendre les accès par des gardes assortis de droïdes de sécurité. Ce n’était pas la plus populaire des mesures, mais il y avait des moments où le respect de l’ordre et de la discipline devait prévaloir. Le peuple devait comprendre que la victoire des Réfractaires ne signifiait pas l’anarchie et le chaos. 

Les flotteurs du Premier Coordonnateur et de son escorte se posèrent sur une plate-forme rétractable de taille moyenne. D’autres gardes l’accueillirent à l’intérieur. Belganov gardait une apparence de sérénité en arpentant les couloirs, puis en empruntant une navette, bien qu’il ait rarement éprouvé autant d’impatience. Sur les murs, des traces noires et des pans de métal tordus racontaient leur histoire. Des équipes de droïdes s’affairaient à remettre les lieux en état. Bientôt, les derniers vestiges des combats disparaîtraient. Les holoprojecteurs simulant l’environnement des Fengirs étaient pour l’instant inactifs mais pourraient être rallumés en cas de visite touristique de l’endroit, à condition de s’avérer inoffensifs. 

Deux gardes étaient postés à l’entrée du sous-sol. Ils saluèrent respectueusement le Premier Coordonnateur par intérim, lui livrant le passage vers l’ouverture béante qui avait remplacé la trappe parfaitement camouflée. Un éclat bleuté révélait la fonction antigrav du conduit. Belganov percevait la nervosité des soldats autour de lui — sa vie comme celle des membres de son escorte allait dépendre d’une technologie fengirienne. Sans hésiter, il accomplit l’enjambée qui le positionna au centre du vide. Quatre des soldats s’empressèrent de le rejoindre. L’attente ne dura que deux secondes avant que les parois ne se mettent à défiler à la verticale. Ils atteignirent le sol avant même de l’avoir réalisé. 

Des robots multifonction servant de machines-outils étaient alignés, inertes. Sur les murs, des lignes couvant d’un feu orange encadraient des séries de casiers. Belganov s’approcha de l’un d’eux et essaya de l’ouvrir, sans y parvenir. 

« Nous n’avons pas réussi non plus, dit l’un des soldats. Cela s’opère sans doute à partir de la salle de contrôle. » 

Belganov fit signe de l’y conduire. En chemin, ils tombèrent sur Halnev qui arrivait en sens inverse. La nervosité visible sur le visage du Premier Guide Communiant devait égaler la sienne, songea Belganov. Halnev brandit une tablette. 

« Notre IS a interfacé les commandes de cette usine là-dessus. Ces robots fabriquent des drones », expliqua-t-il en désignant les rangées de structures entourées de multiples bras articulés. 

A son tour, il s’approcha de l’un des casiers. Il consulta sa tablette, fit défiler les icônes et effleura l’une d’elles. Des nombres apparurent sur les casiers. Halnev sélectionna sur sa tablette le nombre en face d’eux. 

Le casier correspondant glissa vers eux. A l’intérieur, il y avait un étrange mini-drone. Les protubérances qui le recouvraient faisaient penser à des nœuds, et sa coque s’avérait quasi transparente. Effilé sur le devant, il comportait une aiguille si fine à son extrémité que la pointe en devenait presque invisible. 

« Juste un instant, je vais en prendre le contrôle, dit Halnev. Voilà. » 

Le mini-drone fut tout à coup parcouru de courants bleutés le long de ses « nœuds ». Il s’éleva en l’air sans produire aucun bruit. Les soldats autour d’eux échangèrent des regards nerveux. L’aspect de la chose était indéniablement menaçant. 

« L’IS vient de me suggérer une fonction en la faisant clignoter. Essayons. » Halnev effleura une nouvelle icône. 

Le mini-drone disparut. Plusieurs exclamations étouffées retentirent. Belganov approcha sa main de l’endroit où s’était trouvé l’engin. Il en perçut les contours. « Ils ont donc la faculté d’occultation, et cette aiguille à l’extrémité… 

– L’IS me signale une icône d’analyse de contenu du drone, dit Halnev. 

– Allez-y », ordonna Belganov. 

Projeté par la tablette que tenait Halnev, l’hologramme qui apparut avait la forme d’une larve aux anneaux argentés, en tout point similaire à celle qui avait été révélée au Premier Coordonnateur à bord du Rapier. Un frisson de contentement intense parcourut Belganov. Les soldats écarquillaient les yeux en contemplant la morphologie étrange. Le silence était absolu. 

« C’est donc ainsi qu’ils procédaient, fit Belganov au bout de quelques instants. 

– Vous pouvez développer, professeur ? » demanda Halnev. Par réflexe, il était revenu à l’ancien titre de Belganov. 

Le Premier Coordonnateur hocha la tête avant de désigner de l’index un emplacement sur l’arrière de son crâne. « C’est ici que se trouve notre point faible. Un espace infime entre deux zones de notre cortex. Aucun nerf n’y est relié — si vous appliquiez une aiguille sur ce point précis, je ne sentirais rien. 

– Vous voulez dire que ce drone… 

– L’image que vous avez devant vous, cette larve, est le fameux nanite conçu par les ektrims. Les mini-drones occulteurs fabriqués ici en contiennent tous au moins un. Vraisemblablement beaucoup plus. Peut-être des millions. Si mes prévisions sont exactes, les mini-drones ne se contentaient pas de pénétrer subrepticement dans les Cavernes d’Ambre de notre planète pour nous injecter leur cargaison au moment suprême où notre conscience se trouvait dans la matrice. Leur aiguille devait leur permettre d’analyser notre sang, et de le comparer en quelques fractions de seconde à leur base de données afin de savoir si l’ADN correspondait à un individu déjà contaminé par un nanite. Ainsi, les mini-drones pouvaient passer à la cible suivante si c’était le cas. Dans le cas contraire, ils procédaient à l’injection. C’est la preuve formelle que nous recherchions. » 

Certains des soldats se mirent à contempler l’étendue des casiers alentour. Belganov songea qu’il y avait là de quoi infecter la planète entière. Les drones devaient être transportés dans les principales villes par les Fengirs eux-mêmes, qui les récupéraient une fois leur tâche effectuée. Grâce à cette usine secrète, chaque nouvelle génération de Nadarien se retrouvait contaminée, dès que les jeunes étaient en âge de communier avec l’argelen. 

« Nous avons maintenant le moyen de contrer les rumeurs complotistes qui se sont répandues depuis que nous avons annoncé l’existence de ces nanites, dit Belganov. Dès que la base sera remise en état, nous organiserons des visites guidées. Il y aura aussi une reconstitution holographique visitable par tous, à tout moment. Nous ferons en permanence la démonstration de l’existence de ces drones et de leur fonction d’occultation. Les nanites ne peuvent être observés à l’œil nu, mais le caractère exotique des icônes utilisées par les ektrims, ainsi que leur technologie, devrait convaincre le plus grand nombre. 

– Cette technologie ne risque-t-elle pas d’être subtilisée pour être employée de nouveau à des fins néfastes ? demanda Halnev. 

– C’est un risque, mais elle est si avancée qu’elle ne peut être répliquée facilement. Nous devrons établir une sécurité draconienne au moment des visites, qui seront de toute façon interdites aux aliens. Bien évidemment, le centre de contrôle ne sera accessible que par du personnel autorisé. Nous allons, je pense, devoir développer une industrie d’augmentations. A terme, ceux parmi nous qui le désirent pourront être équipés de nanites capables de détecter ces parasites ektrim. Cela devrait limiter la paranoïa des gens. 

– L’IS m’a également confirmé que ces parasites ont une fonction d’autodestruction. Si elle n’a pas été activée jusqu’à présent, c’est bien que ce centre était le seul habilité à envoyer cet ordre, et qu’il n’a pas reçu les alertes prévues à cet effet. Notre plan a donc parfaitement réussi. 

– C’est un immense soulagement, conclut Belganov. Nous allons enfin pouvoir procéder en toute sécurité au retrait parmi la population des nanites anti-ektrim en même temps que des parasites qu’ils ont capturés. »

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jeudi 13 mars 2025

Les leçons du covid

Quelques réflexions rapides sur l'état du monde. Vous en ferez ce que vous voudrez. 

La vérité est tyrannique. Elle ne peut pas plaire à tout moment à tout le monde. C'est absolument impossible. La vérité peut déranger. Et parfois de manière très intime.

Quant à la démocratie, elle a été inventée avant les réseaux sociaux et consiste à gérer les interactions entre êtres humains afin de léser le moins grand nombre, ou si l'on préfère, de satisfaire le plus grand nombre autour d'un projet commun.

Et de préférence, sans heurts.

La démocratie n'a rien à voir avec la démarche de recherche de vérité. Le populisme encore moins.

Qu'est-ce que l'on constate de nos jours? Que les réseaux sociaux sont bien plus puissants que l'éducation, qu'elle soit parentale ou scolaire.

Que la tendance des réseaux sociaux, c'est le vote permanent sous forme de "j'aime" et autres interactions, un vote articulé autour des opinions.
Mais la vérité n'a rien à voir avec le plus grand nombre, qui est une autre forme de rapport de force.

Avec le covid, les gens se sont découverts la possibilité, par le nombre, de nier les conclusions scientifiques qui les dérangeaient. Les immenses enjeux financiers liés aux vaccins contre le covid ont été un formidable tremplin pour cette remise en question.


Cinq ans après le début du covid, on a, et notamment aux Etats-Unis, une prolongation de cette tendance avec le déni non seulement du réchauffement climatique, mais de la science en général.


Et c'est vrai que quand on nie la réalité, on peut en retirer un enivrant sentiment de liberté. Il devient alors tentant d'invoquer la liberté d'expression pour nier de plus en plus la démarche scientifique, et lui substituer l'opinion du plus grand nombre. 

C'est la porte ouverte vers la régression vers les Ages Sombres. 

En tant qu'auteur de SF, il m'est facile d'imaginer, en réaction à un tel phénomène, une dictature de type scientifique.

Je constate d'ailleurs que beaucoup de scientifiques fuient comme la peste les réseaux sociaux.

Mais j'espère qu'on n'en arrivera pas là. J'espère que les gens comprendront qu'à un certain moment, on a besoin de gardes-fous, et de normes. La critique de telle ou telle découverte scientifique est bien sûr parfaitement légitime, et les scientifiques sont les premiers à s'y adonner. Mais faut-il encore savoir argumenter en s'appuyant sur la science et non en la dénigrant. Et croyez-moi, sur Internet, ce n'est pas donné à tout le monde.

En conclusion, il faut aussi signaler que les réseaux sociaux, même de type Facebook où l'on n'est pas limité par le nombre de mots, ne se prêtent absolument pas à la recherche de la vérité. Ils sont trop volatils, trop éphémères pour cela. Ils donnent la part trop belle au spectaculaire. 

lundi 10 mars 2025

L'Essence des Sens : chapitre 37

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le trente-septième.

37. Le début de la fin 

« Mon rêve va enfin se réaliser : je vais embrasser un Circanien sur une île déserte. » Jaynak avait le sourire aux lèvres en couvrant de son regard le personnage en combinaison à proximité de son flotteur. Derrière sa visière, le Circanien avait la peau jaune, des cheveux raides séparés par une raie au milieu du crâne. Il le dévisageait d’un œil critique.

« Moi au moins, fit Naldeia en retirant son casque, dévoilant son beau visage de Nadarienne, je peux retrouver facilement mon apparence. Tu ne peux pas en dire autant, Jay. 

– C’est la faute de la moussor, dit Jaynak. Une idée de Shaella. Toujours mieux qu’un casque vissé en permanence, si tu veux mon avis. » 

Naldeia posa ses mains sur ses épaules, l’attira à lui et l’embrassa voluptueusement. « Je confirme, dit-elle. C’est même beaucoup mieux. Même si ça fait un peu bizarre d’embrasser un autre toi. » 

Ils poursuivirent leur étreinte, profitant du moment. Naldeia retira sa combinaison. 

« Pas mes interstices, espèce de vaurien ! protesta-t-elle en souriant. Pense à notre rendez-vous ! 

– Tu crois que quelqu’un peut nous voir sur cette île déserte ? » 

L’île battue par les vagues leur amenait des embruns iodés. Plate et dénudée, elle se situait à quelques centaines de kilomètres d’Argea. Tous deux avaient enfin pu dormir suffisamment longtemps, après plusieurs mois d’intense activité où ils n’avaient pris que le strict minimum de repos. Ces instants de retrouvailles étaient une trêve aussi minuscule que l’îlot dans l’océan, ils en avaient conscience. Chacun avait le regard plongé dans l’autre, cherchant à graver ce moment dans sa mémoire. 

Une ombre s’étendit sur l’île. Jaynak et Naldeia levèrent les yeux. Ils ne voyaient que le ventre du transporteur fengirien, dont le fuselage tigré de noir et de gris était de sinistre augure. Les réacteurs antigrav ne produisaient qu’un vrombissement feutré. Naldeia s’empressa de récupérer sa combinaison restée au sol. A peine celle-ci entre ses mains, un double rayon antigrav les frappa, et les deux Nadariens commencèrent à s’élever. Un sas s’ouvrit sur leur passage, puis se referma. 

L’atmosphère dans le vaisseau était différente, mais le système pulmonaire des Nadariens est l’un des plus adaptatifs aux mélanges distincts, si bien que Naldeia comme Jaynak furent à peine incommodés. Ils passèrent dans la cabine principale qui faisait aussi bien office de poste de pilotage, de navigation et de combat que d’habitat central. Les commandes et les sièges dédiés aux Fengirs avaient été réaménagés pour des humains. 

Shaella les salua. Fal était là aussi, ainsi que six membres du commando d’élite de l’Angle M dans leur combinaison de combat. Jaynak aurait souhaité un peu moins de ponctualité de la part des services spéciaux de la Confédération des Planètes Unies. 

« Bienvenue à bord, dit Shaella. Avant de vous installer, merci d’enfiler les combinaisons d’assaut. » 

Pendant que tous deux s’exécutaient, Shaella les informa de la situation. La flotte nadarienne venait de forcer les dispositifs de protection du Relais d’Accélération menant sur le système Ixion, et était sur le point de le traverser. Grendchko était bien à bord du vaisseau mère, et de nombreux vaisseaux fengiriens participaient à l’expédition. Du côté de la Confédération des Planètes Unies, des flottes fantômes s’étaient amassées dans les secteurs les plus stratégiques du quadrant habituellement convoités par les forces de l’Expansion. « En réalité, dit Shaella, ce ne sont que des leurres. Les véritables différentes flottes de la C.P.U. se sont rapprochées en ordre dispersé des Relais qui peuvent les amener sur le secteur d’Altanis en trois sauts maximum. Elles se tiennent prêtes. 

– Des nouvelles du professeur Belganov ? s’enquit Naldeia. 

– Votre prochain Coordonnateur a bien enregistré ses messages holo à destination de votre flotte. Lui et ses troupes de Réfractaires n’attendent que notre signal pour agir ici, sur Nadar. 

– Tout est donc en place, dit Jaynak. D’après nos informateurs, mon frère Merek aurait été affecté sur le Strator, le vaisseau mère. J’espère qu’il ne lui arrivera rien. » 

Shaella fronça les sourcils. « Je comprends votre préoccupation, mais vous ne devriez ne vous intéresser qu’à notre mission. Nous avons énormément à faire aujourd’hui, si nous voulons rendre votre peuple à son destin. Vous êtes-vous entraîné à l’utilisation de votre combinaison ? 

– Chaque fois que je l’ai pu, sur simulateur. 

– Idem, fit sobrement Naldeia. 

– Ses systèmes d’acquisition immédiate et de servomoteurs cherchent à compenser l’absence d’Augmentation chez l’utilisateur. Vous vous déplacerez plus rapidement, vous viserez plus vite et plus juste. Son champ de force vous protégera du moment que des armes lourdes ne sont pas employées. 

– S’ils ont le temps d’en mettre en batterie, c’est que nous aurons échoué dans notre tentative », dit Fal. 

Ayant revêtu leur combinaison, Naldeia et Jaynak s’installèrent dans leurs fauteuils gravimétriques. Le transporteur de guerre enclencha ses fonctions d’occultation avant de mettre le cap sur Argea. 

Les multiples épreuves que Jaynak et ses compagnons avaient traversées ces derniers mois menaient toutes à ce moment décisif. La révolte des Réfractaires serait-elle acceptée par la société ? Même s’ils étaient vainqueurs ici sur Nadar, tout pouvait être remis en cause par la flotte, si la mutinerie contre Grendchko venait à échouer. La partie se jouait sur des niveaux tellement différents que mieux valait ne pas y songer de manière trop précise. Jaynak se tourna vers Shaella. « Commandant, je croyais que seuls des Nadariens devaient intervenir sur notre planète ? 

– Les enjeux sont trop importants ici pour que je ne mette pas la main à la pâte, répondit-elle en le fixant de ses yeux verts. Nous n’interviendrons que dans des bâtiments ne correspondant pas à l’architecture traditionnelle nadarienne, ce qui rend l’opération tout à fait réalisable — il n’y aura pas de problèmes de gravité. 

– Nous aurions même pu avoir un autre allié à nos côtés, suggéra Fal. 

– Le Quantorien Balchak, oui. Il s’est montré très désireux de participer, expliqua Shaella à Naldeia et Jaynak. Je suis bien placée pour comprendre son besoin d’action, mais pour le moment, je préfère qu’il couvre nos arrières. 

– Où est-il, en ce moment ? s’enquit Jaynak, plus pour meubler la conversation que par réel intérêt. 

– Dans son vaisseau L’Eclat d’Alcor. Caché derrière un astéroïde en orbite de la planète. » 

Comme le transporteur s’approchait du noyau de Megeal, toujours occulté, Shaella demanda à Jaynak s’il était prêt à jouer son rôle. Il répondit par l’affirmative. « Mettez votre casque, commanda-t-elle. Les autres aussi. Le programme va modifier votre voix pour lui donner le timbre et l’accent fengirien, dit-elle. Surtout, montrez de l’autorité. » Elle-même enfila son casque, qui s’ajusta à sa combinaison. 

Jaynak hocha la tête. Le transporteur avait commencé sa descente. L’arche de vitriglass et le bâtiment à la symétrie parfaite étaient terriblement familiers. 

« Désoccultation », fit Fal. 

Jaynak prit une inspiration. « Ici le transporteur Croc de Shaenor, en visite d’inspection. Adepte Ymeo, Beyl et Yrkel, présentez-vous immédiatement devant le bâtiment. Habilitation Helgash 1. » 

L’image que recevaient les agents de l’ORG était celle d’un Fengir. La voix transformée de Jaynak avait contenu suffisamment d’intimidation. L’androïde Beyl devait y être insensible, mais tout comme les nanites ektrim conditionnaient les Nadariens à obéir sans discuter aux injonctions des Fengirs, sa programmation devait le contraindre à se plier aux directives. D’autant que l’habilitation Helgash 1 était la plus impérative. Quant au code d’identification du transport fengirien, il devait encore être valide selon Shaella. 

Les portes du bâtiment de l’ORG ne tardèrent heureusement pas à s’ouvrir. Seuls Yrkel et Beyl se présentèrent. Jaynak eut aussitôt l’intuition qu’Yméo avait pris peur. Les derniers rapports des Réfractaires signalaient que l’Adepte était en disgrâce auprès de Grendchko, elle devait donc penser que les Fengirs avaient décidé de la punir — ce qui n’était après tout pas si loin de la réalité. 

« Tant pis ! lança Shaella, répondant à l’interrogation muette de ses équipiers. On y va ! Maintenant ! »

Elle commanda par son nanite l’ouverture des portes du transporteur. Cinq des dix occupants bondirent au sol, l’arme au poing. Jaynak pressa la détente de son disrupteur. L’indicateur de sa visière avait désigné le centre de la poitrine d’Yrkel, qui fut également touché à la tête par un autre commando. Catapulté en arrière, il s’écroula. Les trois autres avaient concentré leurs tirs sur Beyl, tout en avançant pour laisser la place au reste de l’équipe. 

L’androïde de l’ORG bénéficiait d’un champ de force qu’il activa juste à temps. Néanmoins, les tirs encaissés le firent reculer de deux pas. 

Du coin de l’œil, Jaynak vit Shaella s’envoler dans sa combinaison antigrav, et ajuster à son tour l’androïde. Jaynak tira lui aussi sur Beyl, dont le champ de force rougissait de plus en plus. Naldeia en fit autant. L’androïde étendit les bras. Il répliqua avec une décharge d’éclairs bleus, qui vinrent mourir sur le champ de force de Fal en crépitant. 

Les deux épaulettes se détachèrent de Fal. Les mini-drones se dirigèrent vers Beyl à grande vitesse et ouvrirent le feu sous différents angles. Fal lui-même menait une attaque aussi bien physique que quantique afin de surcharger les systèmes de communication de l’androïde ennemi. 

La pression s’avéra trop forte. Le champ de force de Beyl finit par disparaître et l’androïde fut désintégré. L’explosion répandit ses vibrations sur toute la plate-forme, mais les boucliers magnétiques des membres du commando les protégèrent du souffle de la destruction comme des débris. 

Les portes du bâtiment étaient restées ouvertes. La commande de champ de force intégral prévu en pareille instance pour défendre les locaux de l’ORG avait donc bien été bloquée par les attaques quantiques conjuguées du Croc de Shaenor et de Fal. Le commando se rua à l’intérieur. Sa combinaison procurait tellement de vélocité à Jaynak qu’il fut le troisième à entrer. Cinq drones SR approchèrent à toute vitesse, et l’un d’eux lui tira dessus, illuminant son champ de force d’un éclat bleuté. Jaynak bondit de côté. Avant même de rouler au sol, il répliqua et pulvérisa le drone. D’autres tirs des commandos manquèrent les quatre autres, ceux-ci ayant enclenché leur dispositif d’évasion. 

« Ne tirez pas ! commanda Fal en levant le bras. Laissez-moi faire. » 

Les pupilles de l’androïde disparurent, ses yeux devinrent gris et blanc. Les drones ennemis se figèrent en suspension et se mirent à trembler. Les uns après les autres, ils firent volte-face. Puis se précipitèrent là d’où ils étaient venus, escortés par les deux mini-drones de Fal. « J’ai pris le contrôle », commenta simplement celui-ci. Peu après, Fal enjoignit aux employés de l’ORG, par l’entremise de ses drones, de se rendre. Le personnel n’opposa aucune résistance. 

Le groupe pénétra dans la salle de commandement. Yméo n’y était pas. Shaella demanda à Fal d’envoyer ses drones à sa recherche. « C’est la console principale ? s’enquit Shaella en désignant l’un des terminaux. 

– Affirmatif », répondit Naldeia. 

Shaella s’en approcha, puis fit signe à ses hommes. « Mettez-vous en mode augmentation, dit-elle. Fal, tu te joins à nous. Attaque quantique coordonnée sur les Intelligences Synthétiques de ces terminaux. Maintenant ! » 

Jaynak et Naldeia s’entreregardèrent. Les membres de l’Angle M, concentrés sur leur objectif, s’étaient tous raidis à l’exception de Fal. Si focalisés sur leurs implants, même, que Jaynak se dit qu’ils seraient vulnérables en cas d’attaque physique. Il se mit à surveiller avec inquiétude les entrées du centre, imité par Naldeia. Peu de temps passa cependant avant que les humains ne reprennent des postures qui leur étaient plus naturelles. 

« Première partie de l’opération réussie, dit Shaella. 

– La bulle d’isolement des communications a presque été sans défaut, compléta Fal. Seul un centre de sécurité local tenu par des Gardiens de l’Harmonie a reçu une alerte. 

– J’ai déjà averti nos alliés Réfractaires, dit Shaella. Ils vont faire le nécessaire à leur sujet. 

– Et Yméo ? demanda Jaynak. 

– Elle s’est enfuie à bord d’un flotteur, répondit Shaella. Sa trajectoire est à l’opposé de notre prochain objectif. 

– Elle ne va donc pas prévenir les Fengirs ? s’étonna Naldeia. 

– A mon avis, elle a peur de ce qu’ils vont lui faire, dit Jaynak. Je ne pense pas qu’elle soit un danger. 

– Je suis d’accord, fit Shaella. L’opération va maintenant entrer dans sa phase 2. Nous allons commencer par asservir les IS de l’ORG, afin de renforcer notre potentiel offensif sur les réseaux virtuels. 

– C’est en cours », fit Fal d’une voix mécanique. Pendant que l’androïde de l’Angle M accomplissait sa tâche, les membres du commando enfermèrent les Nadariens faisant partie du personnel de l’ORG dans l’une des pièces du bâtiment réservées au stockage de fournitures. A leur retour, Fal, assisté de Shaella, était parvenu à s’assurer le contrôle de la puissance de calcul des Intelligences Synthétiques. 

« Retournons au transporteur, commanda Shaella. Des Réfractaires sont en route pour prendre le relais ici. Ils nous informent en revanche que leurs collègues n’ont pas encore pris le contrôle du centre de sécurité local. Les combats font rage, et le risque de mettre en alerte les Fengirs ne va faire que s’accroître. » 

Jaynak, Naldeia et les autres coururent à sa suite, et rejoignirent le transporteur en un rien de temps. Shaella mit cette fois le cap sur l’ambassade fengirienne, qui était d’après ses sources le centre névralgique de commandement des Fengirs sur Nadar. Elle contacta Belganov, dont le visage holo se matérialisa au-dessus de la console de communication. « Nous lançons la phase ultime de l’opération, dit-elle. 

– Entendu, commandant, fit le professeur. Nous attendrons votre signal. Bonne chance. » 

Un volumineux bâtiment rectangulaire, jurant avec l’architecture infiniment moins orthodoxe d’Argea, se dessina. Shaella assuma la tâche d’appeler le commandement fengirien — l’IS du Croc de Shaenor lui donna l’apparence et la voix d’un Fengir expérimenté, dont elle déclina le nom et le rang. « Nous avons ordre du haut commandement de venir vous renforcer pendant toute la durée de la campagne sur Oblan, expliqua-t-elle. 

– Ce n’est pas de refus. Notre garnison est vide, et les rapports indiquent une agitation croissante de la populace ici. Permission de vous ranger sur la plate-forme 2E. » 

Shaella savait son plan peu sophistiqué. Son principal atout, outre l’effet de surprise, était que les Fengirs avaient en général recours instinctivement à la force brute plutôt qu’à la technologie. Le fait même que Fal ait pu tromper l’ennemi sur leur apparence jusque là était rassurant. Relié à l’Intelligence Synthétique du vaisseau, mais aussi aux systèmes de l’ORG, l’androïde voyait sa puissance de calcul décuplée. 

Elle posa le transporteur sur la plate-forme 2E. Bientôt, celle-ci se rétracta pour entraîner le vaisseau à l’intérieur du hangar de stérilisation, où l’on procédait à la désinfection des appareils et de leurs occupants. Alentour, l’espace vide était impressionnant, il n’y avait presque aucun autre vaisseau. Des machines à l’extrémité conique gravitèrent autour du transporteur. Une brume blanche ne tarda pas à entourer la carlingue. 

« Activation du faux denorium », ordonna Shaella. 

Une fumée jaunâtre nettement plus épaisse que celle de stérilisation se propagea dans le hangar. 

« Nous avons une fuite importante de denorium, signala Shaella à son contact Fengir. Demandons l’envoi immédiat d’un droïde de réparation de type Méca 37 X. 

– Bien compris. Surtout, restez à bord en attendant son intervention. 

– La procédure sera respectée. » Contrairement à ce qu’elle venait de dire, Shaella ouvrit l’écoutille inférieure, misant sur l’épaisse fumée pour empêcher tout repérage visuel, et sur le piratage à distance des dispositifs de détection, lequel avait jusque là bien fonctionné. 

Pour mettre en œuvre toute la puissance quantique dont il disposait, et s’assurer le contrôle des systèmes automatiques du centre, Fal avait cependant besoin d’un contact plus direct avec l’une des consoles. Il fut le premier à sortir du vaisseau, et mit en fonction son dispositif antigrav pour voler en direction du sas où apparaîtrait le droïde méca. Le reste du commando demeura à bord, de crainte que les signaux biologiques de ses membres, différents de ceux des Fengirs, ne soient malgré tout détectés. 

Shaella se mit en relation avec Fal via son augmentation, voyant au travers de ses yeux. L’androïde Méca 37X avait la silhouette d’un bipède aux énormes épaules et aux membres inférieurs puissants, à la tête ovoïde affleurant légèrement. Il disposait de champs de confinement capables de contenir n’importe quel type de fuite. Fal ne lui laissa pas le temps de s’avancer vers le transporteur. Dès que le sas s’ouvrit, il abattit d’un geste foudroyant sa main sur l’épaule de sa victime et engagea l’offensive au niveau quantique. Moins d’une seconde plus tard, le cerveau positronique du méca modifia son allégeance. Sur ordre de Fal, le droïde se plaqua contre la porte du sas pour l’empêcher de se refermer. 

« Allons-y ! » lança Shaella. 

Cette fois, plusieurs des portes du transporteur s’ouvrirent à l’unisson, livrant passage aux membres du commando, dont les visières tête haute fournissaient un aperçu du décor dépourvu de l’envahissante fumée. 

Shaella s’élança en activant ses fonctions antigrav. Regardant derrière elle, elle vit Naldeia et Jaynak, d’abord distancés, les rejoindre à vive allure. Elle approuva de la tête. Moins habitués que les autres membres du commando à leur combinaison, les Nadariens s’adaptaient rapidement. Le droïde méca maintenait toujours la porte du sas ouverte. Le commando se rua à l’intérieur, et Shaella éprouva le sentiment soudain de leur vulnérabilité — si nombreux dans un si petit espace ! Fal ordonna au droïde de relâcher sa prise, puis d’ouvrir l’autre porte du sas, avant même la fin du processus de décontamination. 

Ils s’avancèrent dans un couloir. Le droïde était d’autant plus précieux qu’il possédait les plans généraux des lieux, que Fal partagea à chacun des membres augmentés du commando. Shaella fit s’illuminer la partie du plan correspondant au centre de contrôle des hangars, signalant ainsi silencieusement leur prochain objectif. Jaynak et Naldeia, qui ne disposaient pas d’augmentations aussi perfectionnées que les autres membres de l’équipe, se contentaient de suivre. 

A l’exception d’un droïde d’entretien qu’ils croisèrent, dépourvu de toute programmation de sécurité, les couloirs étaient vides. Ils prirent deux embranchements différents avant d’emprunter un canal modgrav qui les fit grimper d’un étage. Shaella se sentait comme un poisson dans l’eau. Rares étaient les séquences d’action non simulées dans son métier, et même si les holosims s’avéraient extraordinairement réalistes, rien ne valait la modification du champ d’existence en temps réel. Fal avait mis en circulation ses drones-épaulettes, qui opéraient des reconnaissances et permettaient de découvrir le terrain à l’avance. Le droïde-méca, n’étant pas autorisé à pénétrer dans le centre de commande, n’avait pas la possibilité de le déverrouiller. L’obstacle était cependant attendu. Fal plaqua sa paume contre la serrure quantique et lança le programme d’acquisition. La porte se rétracta dans la paroi. 

Les drones furent les premiers à se ruer à l’intérieur, fournissant aussitôt des images. Il y avait cinq Fengirs dans le centre. Doté de réflexes foudroyants, l’un d’eux abattit l’un des drones. Le premier membre du commando à entrer fut instantanément pris pour cible. Son champ de force s’illumina d’une lueur bleutée tandis qu’il ripostait, éliminant l’un des Fengirs. Il s’avança vivement et tira sur un second individu à la fourrure fauve, qui bondit de côté et parvint à rester en vie. Fal entra en action, foudroyant coup sur coup deux ennemis. Shaella et Jaynak firent irruption côte à côte. Du coin de l’œil, la commandante perçut une menace et opéra une rotation du buste tout en prenant de l’altitude. 

Ce n’était pas elle que le Fengir visait. D’un bond prodigieux, il s’était jeté sur Jaynak. Il abattit deux de ses pattes griffues et Jaynak fut projeté contre des consoles. Naldeia poussa un cri. L’impact fut cependant considérablement amorti par le champ de force de sa combinaison associé au système antigrav, lequel compensa automatiquement la vitesse trop dangereuse. Sans cela, le choc aurait pu lui briser l’échine. 

Shaella aligna le Fengir. Touché au torse par le rayon de son disrupteur, celui-ci s’écroula, un trou dans la poitrine. 

Naldeia vit Jaynak remuer, ce qui la rassura quelque peu. Elle repéra l’un de leurs ennemis du côté le plus éloigné de la salle. Il s’efforçait apparemment de déclencher l’alerte via la console de communication, sans pour autant parvenir à ses fins grâce aux ondes perturbatrices de Fal. Elle dut tirer trois fois avant de réussir à l’abattre. 

Le silence se fit. Chacun reprit son souffle. Jaynak tenta de se redresser. Il avait une double griffure spectaculaire sur sa combinaison. Naldeia se précipita vers lui, morte d’inquiétude. Elle ignorait si elle devait essayer de le relever ou l’allonger. En s’approchant, elle vit que les rayures n’avaient pas pénétré sur toute l’épaisseur de la combinaison — Jaynak était secoué, mais reprenait peu à peu ses esprits. Elle l’aida à se redresser. 

Déjà, Fal s’affairait au-dessus de l’une des consoles. Shaella accéda à l’interface de l’androïde, et sut en même temps que lui que l’alerte n’avait pu être donnée. Le centre de contrôle n’était qu’une annexe, cependant il était relié au cœur de la base. Une fois connecté, Fal lança une attaque quantique massive. Comme Shaella l’avait soupçonné, les systèmes du centre n’avaient pas été remis à jour depuis assez longtemps, nul chez l’ennemi n’anticipant une infiltration de l’intérieur. Bénéficiant de la puissance de calcul combinée des systèmes de l’ORG et de ceux du Croc de Shaenaor, exploitant à fond l’effet de surprise, Fal obtint une victoire aussi rapide que décisive. Il ouvrit à distance les accès au centre, au moment où Shaella donnait le signal d’assaut à Belganov et à ses troupes. 

« L’ennemi va tenter de passer à l’offensive ici, dit Shaella. Portez-vous aux endroits que je vous indique sur le plan, et surveillez les accès. Naldeia et Jaynak, vous restez avec moi. » 

Il ne s’agissait toutefois que d’une mesure de précaution. Contrôlant tous les accès, Fal bloquait l’avancée des Fengirs, qui devaient détruire une à une des portes conçues pour résister à de nombreux assauts. Dans le même temps, il s’assurait de laisser le passage à leurs alliés. 

Le mot « reddition » étant absent du vocabulaire fengirien, Shaella s’arrangea pour que ses alliés combattent leurs oppresseurs à dix contre un chaque fois que nécessaire. Huit heures plus tard, le centre entier tombait sous le contrôle des Réfractaires. Malgré toute la bravoure des Fengirs, les pertes chez les Nadariens s’avéraient minimes. 

Belganov en personne pénétra dans l’ambassade, entouré d’une garde prétorienne. Les retrouvailles avec Jaynak et Naldeia n’eurent rien de protocolaire mais réchauffèrent les entrailles. 

Fal put se connecter au cœur du dispositif, et prendre le contrôle à distance des systèmes de sécurité et d’ouverture des autres complexes fengiriens sur la planète. Dans différents points du globe, l’assaut fut donné simultanément par les Réfractaires, dont les rangs et les moyens avaient grossi à mesure qu’ils convertissaient à leur cause leurs compatriotes. Ce fut le début de la fin de la mainmise des Fengirs sur Nadar. 

 

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