samedi 22 novembre 2014

[Archive 2 juillet 2012] Le tournant de ma carrière

On peut à bon droit se demander s'il n'est pas trop tôt pour parler, en ce qui me concerne, de carrière d'auteur. Je retiens deux critères pour me situer dans mon cheminement professionnel. Celui de Joe Konrath qui estime qu'un auteur peut être considéré comme pro à partir de 5000 exemplaires vendus. J'en suis à plus de 2500 en comptant les différentes auto-éditions d'Espace et Spasmes devenu Les Explorateurs, et en englobant les ventes d'ebooks. Et celui de Dean Wesley Smith selon lequel on devient pro à partir d'un million de mots écrits. J'en suis à plus de 500 000 depuis 2001 (je parle bien évidemment uniquement de textes de fiction, pas de mes articles en tant que journaliste ni de mes billets sur ce blog). Les deux critères me classent en tant que semi-pro, ce qui signifie qu'il y a au moins embryon de carrière. Même si ces chiffres peuvent prêter à sourire si on les compare à ceux d'auteurs renommés, il y a eu un moment dans mon parcours où je suis passé de "presque rien" en termes de ventes à "quelque chose". Cette expérience peut servir à d'autres, c'est pourquoi je juge utile d'en parler ici.
 
Dans un parcours de vie, il y a des événements, positifs ou négatifs, qui en déterminent d'autres. Parfois, le négatif peut déboucher sur du positif, à condition de réagir. De 2001 à 2008, si j'ai vendu 150 livres, et principalement à des proches, c'est le bout du monde. Quel a donc été le tournant ?
 
On pourrait parler de la sortie du Souffle d'Aoles en 2010. Ou au contraire revenir beaucoup plus tôt en 2000-2001, et se souvenir de l'éclatement de la bulle Internet qui m'a amené à perdre mon précédent emploi de journaliste titulaire, puis peu à peu mon activité en tant que pigiste, et à développer mon projet d'écriture.
 
Ou bien sûr l'expliquer par la rencontre avec ma femme en l'an 2000, puisque sans son soutien, je n'en serais sans doute pas là aujourd'hui.
 
Ou encore, revenir sur les déconvenues avec les éditeurs : les manuscrits rejetés, le désastre de ma relation avec Bragelonne ou l'expérience peu probante (ou probante à contrario) avec les éditions Lokomodo. Tout cela, bien sûr, m'a conduit à privilégier l'autoédition, un choix déterminant.
 
Ou enfin, évoquer cette période en 2006 où j'ai été amené à me reconvertir pour trouver un boulot alimentaire stable. Etape très importante, parce que j'avais besoin d'une certaine tranquilité d'esprit pour écrire, et parce que c'est ce travail qui nous a permis de déménager en banlieue parisienne et de nous loger de manière plus confortable.
 
Trouver un emploi stable a été un virage très important. Mais en ce qui regarde l'activité de ventes de livres, la quête de lecteurs qui est l'une de mes motivations essentielles dans l'écriture (je dois écrire pour les autres), le véritable tournant de ma carrière a été le fait de quitter Paris début 2007, où je résidais depuis 1996 - d'abord dans le XIIème arrondissement, puis à trois avec ma femme et ma fille dans un 50 m2 à côté de la Porte de Saint Cloud.
 
Lorsque j'étais à Paris, j'avais déjà une activité d'autoédition. Mes couvertures faisaient nettement plus amateur, et je ne suis pas, pendant cette période, parvenu à obtenir une seule séance de dédicace en librairie. J'en ai été réduit à dédicacer dans une salle de jeux en réseau (oui, c'est en lien avec mon expérience précédente de journaliste critique dans les jeux vidéo). L'expérience s'est soldée par un désastre.
 
J'avais déjà un véhicule à Paris, mais qui m'encombrait davantage qu'autre chose. En arrivant à Pontoise en 2007, nous avons été amené à changer de voiture, en prendre une suffisamment spacieuse pour contenir une famille, mais aussi des cartons de livres.
 
D'un seul coup, les possibilités se sont ouvertes. Je ne m'en suis pas rendu compte sur le moment. Mes échecs précédents m'avaient quasiment persuadés qu'il me serait impossible de vendre en dédicace. A cet égard, mon expérience avec Lokomodo en 2009 a prouvé le contraire. J'ai regagné de la confiance en moi, et bien sûr, je me suis rendu compte que malgré les ventes, mes revenus d'auteur s'avéraient très insuffisants en étant édité.
 
Entre 2001 et 2008, j'ignorais que 25% de la population intra-muros de Paris est liée à une activité autour de l'intermittence du spectacle. Je n'avais pas mesuré à quel point Paris était la capitale du spectacle et du tourisme. Je veux dire, quand vous embarquez dans votre frêle esquif avec votre canne à pêche, vous n'allez pas pêcher dans des eaux infestées de requins, ça ne risque pas de mordre. C'est vous qui risquez de vous faire mordre.
 
J'ai compris que les conseils de ceux qui prétendaient que s'éloigner de Paris revenait à "s'enterrer en banlieue" et se couper d'opportunités de travail avec de grands éditeurs, ces conseils-là étaient préjudiciables. En tout cas pour moi. C'est en banlieue parisienne qu'il y a le plus de monde. C'est là que les libraires des grands centres culturels sont le plus ouverts à des auteurs ayant une démarche professionnelle. Pas tous, mais il y en a.
 
Pour l'anecdote, en décembre 2010, j'ai enfin réussi à obtenir une séance dans une librairie au coeur de Paris (derrière le BHV). Il y a eu beaucoup d'affluence dans cette librairie. Et je n'ai fait que six ventes.
 
J'ai beaucoup pensé à une certaine pub du journal Le Parisien ce jour-là. J'ai vraiment pu comparer avec mes séances en banlieue et dans l'Oise. Et je réalise à présent que toutes mes dédicaces dans Paris se sont soldées par des échecs. Toutes sans exception. Cela dit, Paris est une ville merveilleuse... pour y faire du tourisme ou pour sortir.

[EDIT 22/11/2014] Les fameuses pub du Parisien

 

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