vendredi 14 novembre 2014

[Archive 18 septembre 2012] S'éduquer au numérique

Le numérique est un fantastique outil de démocratisation de la culture. Je pourrais ajouter, "à condition de le mettre à portée de tous en terme de prix et de facilité d'achat", mais cette condition ne se pose même pas grâce aux sites de téléchargements illégaux. A ce sujet, vous croyez que toutes les oeuvres numériques sont piratées ? C'est faux. Pour un artiste, avoir son oeuvre piratée est une marque de reconnaissance du public. A titre personnel, je suis satisfait de savoir que mes ebooks ont la possibilité d'être diffusés par ce canal. Néanmoins, la diffusion n'est pas tout. Je suis persuadé que nous autres auteurs, musiciens, chanteurs, dessinateurs, réalisateurs et créateurs de tout poil devons nous éduquer au numérique, et éduquer à ce sujet nos enfants. Simple question de bon sens.
 
Loin de moi l'idée de dire "c'est mal de pirater", ou "c'est mal de télécharger". Les enjeux tuent le jeu, dit-on. Le piratage peut se trouver détourné à des fins financières ou pour des motifs idéologiques ou politiques, mais par essence, c'est un jeu entre l'attaque numérique et la défense.
 
Le téléchargement illégal peut quant à lui répondre à des motifs de curiosité, de prix trop élevés, de produits non disponibles sur le marché, ou même de volonté parfaitement légitime de ne pas acheter plusieurs fois le même produit (sous forme physique et numérique). Dans le cas notamment de la curiosité, il joue un rôle d'ouverture culturelle. Il peut même s'avérer bénéfique pour l'achat ultérieur d'autres œuvres de l'artiste.
 
Là où le téléchargement illégal devient condamnable, à mon humble avis, c'est quand il se transforme en réflexe systématique de consommation. "C'est numérique, donc ça doit être gratuit. Ça ne peut pas se consommer d'une autre manière que gratuitement. Puisqu'il y a moyen d'obtenir les fichiers gratuitement, on se ferait avoir si on devait les payer." Cet idéal du tout gratuit est évidemment destructeur pour les artistes à partir du moment où tout le reste n'est pas gratuit dans la société.
 
Nous vivrions dans un Etat providence, où le travail se ferait sur la simple base du volontariat et où chacun aurait de quoi se nourrir et se loger gratuitement, je n'aurais pas de problème avec le tout gratuit numérique. Nous n'en sommes pas (encore ?) là.
 
Donc, je n'aime pas l'idée de faire la morale ou de devoir pointer du doigt les uns ou les autres, mais désolé, à partir du moment où un artiste se procure exclusivement des fichiers en téléchargement illégal, il se tire une balle dans le pied. S'il donne cet exemple, comment s'étonner après qu'il ne puisse vivre de ce qu'il fait ? 
 
Pour recevoir, il faut aussi savoir donner. Je veux dire, il y avait 8000 intermittents du spectacle dans les années 80 en France, il y en a plus de 100 000 à présent. Et combien y a-t-il d'auteurs ? Un million en France ? Davantage ? Nous allons vers une société de loisirs. Une société de loisirs majoritairement numériques, en attendant peut-être une autre technologie, qui sait.
 
Eduquons-nous. Achetons des morceaux de musique quand un artiste nous plaît. Apprenons à nos enfants à reconnaître les mérites du travail artistique. Donnons-leur cette culture. Apprenons-leur que les fichiers MP3 ne restituent pas l'intégralité des sons.
 
Quand on ne connaît pas un romancier, télécharger illégalement l'un de ses ebooks, oui pourquoi pas, si les extraits du livre sont trop courts pour se faire une idée, si l'ebook est trop cher et si vous ne le trouvez pas en bibliothèque. Mais à un certain moment, il va falloir apprendre à récompenser le travail des uns et des autres, si l'on espère soi-même en faire un moyen de subsistance.

1 commentaire:

Nathalie Bagadey a dit…

J'approuve complètement, Alan !! Merci de cet article !! :)