Le ping, quelque part, est un sport de schizophrène. En tout cas pour les joueurs qui entendent en faire une profession.
En tant qu'ancien petit joueur de club, j'ai gardé l'impression de l'importance du club. De mouiller le maillot pour le club, un peu comme en foot. J'ai joué principalement au stade de la départementale (au niveau le plus faible) au TT Manosquin dans les années 80 (le club a changé de nom depuis). Le président du club s'appelait Monsieur Vincent. J'ai eu la chance et le privilège d'être entraîné par Christophe Lebrun, frère aîné de Stéphane, qui n'est autre que l'un des oncles des fameux frères Lebrun.
En anglais, on aurait pu dire de Christophe "he's a natural". Ou si vous préférez : il a les gènes du ping. Limité par un souffle au cœur, il n'a jamais été mieux classé que 30 (à ma connaissance). Pas trentième, 30. Son frère Stéphane a été quant à lui 7ème joueur français. Je garde un excellent souvenir de mon passage en club, et de cette formation.
En anglais, on aurait pu dire de Christophe "he's a natural". Ou si vous préférez : il a les gènes du ping. Limité par un souffle au cœur, il n'a jamais été mieux classé que 30 (à ma connaissance). Pas trentième, 30. Son frère Stéphane a été quant à lui 7ème joueur français. Je garde un excellent souvenir de mon passage en club, et de cette formation.
Peu de clubs en France ont les moyens de payer un salaire à leurs joueurs. Mais pour les joueurs qui en bénéficient, ça se tient de mouiller le maillot pour le club, et de lui rester fidèle: ces clubs vont offrir aux joueurs pro le plus de stabilité financière. En Bundesliga, Timo Boll touchait 500 000 euros par an. Des stars moins connues pouvaient toucher plus de 150 000 euros par an. Régularité. Stabilité.
On vient d'apprendre que l'ancien numéro 1 mondial chinois, la médaille d'or des JO 2024 Fan Zhendong, venait de rejoindre le club de Sarrebruck. C'est dire le besoin de stabilité d'un joueur malmené par le circuit international de la WTT.
Les
clubs de ping ont même créé la ligue des champions, ce qui pourrait
donner l'impression de se rapprocher du modèle du foot, avec un nom
extrêmement prestigieux.
Mais en réalité, le ping partage avec le tennis le même ADN de sport individuel.
Ainsi, il faut savoir que les matches de ligue des champions de ping, qui sont des matches de club, n'engrangent aucun point de rang international pour les joueurs. Ce sont donc des matches qui vont encombrer le calendrier sans pour autant permettre un meilleur classement, et donc d'accéder à de meilleurs tournois.
Là où les matches de circuit WTT et les matches de compètes internationales reconnues par l’ITTF (JO, championnats du monde...) permettent à la fois un meilleur classement et un plus grand prestige, tout en offrant la possibilité d'affronter les meilleurs joueurs du monde.
Mais là où le bât blesse, c'est dans la dotation de ces tournois. Les deux plus importants tournois de ping sont dotés à 3 millions de dollars, là où Roland Garros 2025 est doté à plus de 56 millions d'euros. Le WTT Champions de Montpellier, par exemple, était doté à 460 000 €. Mais avec le ping, les sommes baissent très très vite dès que l'on parle de Contender ou de Feeder (les différents échelons du circuit).
Les lecteurs de ce blog se souviennent de l'article intitulé "Scandaleux" que j'avais écrit au sujet de la rémunération des tournois WTT.
Et donc, la plupart des joueurs de ping pro restent dépendants de leur club pour leurs revenus, ce qui crée une situation davantage schizophrénique que complémentaire: les joueurs attirent du prestige sur leur club en participant au circuit international, certes, mais la WTT exige une participation minimale aux meilleurs joueurs, ce qui ne peut manquer de créer un fossé avec les clubs et le public qui suit les compètes de club.
J'ai posé la question suivante à Chat GPT : "dans quelle mesure le circuit WTT, en imposant des règles de participation à ses tournois pour les meilleurs joueurs, ne se met-il pas en compétition avec les championnats de clubs?"
Réponse :
Excellente question : tu touches à un point de tension réel dans le tennis de table mondial actuel. Le développement rapide du circuit WTT (World Table Tennis), avec ses règles de participation strictes pour les meilleurs joueurs, entre clairement en concurrence avec les championnats de clubs, notamment en Europe (Bundesliga, Pro A, ETTU Champions League). Voici une analyse détaillée.

Depuis sa refonte en 2021, le circuit WTT a :
- centralisé les tournois internationaux ITTF dans une nouvelle structure plus médiatisée et lucrative (WTT Contender, Star Contender, Champions, Grand Smash)
- imposé des obligations aux meilleurs joueurs, par exemple :
Obligation de participer à un certain nombre de tournois WTT pour être éligible aux WTT Finals et aux points ITTF.
Réduction des wildcards et introduction de restrictions d’inscription (classement minimum requis, quotas de joueurs par pays, etc.).
Certaines fenêtres de tournoi sont fixées dans des calendriers bloqués, incompatibles avec les matchs de clubs.

En quoi le WTT est en concurrence directe :
Tension

Les meilleurs joueurs doivent parfois choisir entre leur club et un tournoi WTT, car les dates se chevauchent (notamment les WTT Champions et Grand Smash).

Le rythme WTT est intensif et mondial (Asie, Moyen-Orient, Europe), ce qui limite la disponibilité des joueurs pour les matchs de championnat hebdomadaires.

Certains clubs paient cher des joueurs vedettes… qui manquent des matchs clés car ils privilégient leur carrière WTT.

Pour les spectateurs des championnats nationaux, voir des stars absentes ou peu impliquées nuit à l'intérêt du public et des sponsors.

Certaines structures trouvent des compromis :
Adaptation
Exemple :

Des clubs comme Düsseldorf ou Chartres laissent partir leurs stars (ex. Boll, Gauzy) sur les WTT, quitte à faire tourner l’effectif.

Les clubs et joueurs fixent à l’avance les priorités de présence, souvent autour des phases décisives (playoffs, Ligue des Champions).


Aspect WTT Championnats de clubs
Objectif Développer une ligue mondiale avec prestige et points ITTF Stabilité financière et compétition collective
Public ciblé International, sponsors globaux Régional/national, abonnés
Flexibilité Moindre : présence imposée pour classement Moyenne : dépend des clubs
Tension ?
Oui, croissante
Oui, en particulier avec les grands clubs



La tendance actuelle pousse les jeunes talents à privilégier le circuit WTT, surtout pour :
Gagner en visibilité mondiale.
Monter au classement ITTF.
Se qualifier pour les JO et mondiaux.
Mais cela crée une fracture avec les clubs, surtout ceux qui misent sur la régularité des meilleurs joueurs.
ADDENDA 05/06/2025: là où le circuit WTT, pour ses tournois les plus importants, se différencie du tennis, c'est qu'on a un accompagnement des joueurs qui se rapproche plus de la Coupe Davis en tennis, et non par exemple des tournois du Grand Chelem. A savoir que c'est le staff technique au niveau national qui va accompagner les joueurs participants à ces tournois les plus prestigieux (donc, pas les Contender ou les Feeder), et qu'un seul entraîneur national coachera tous les joueurs d'une même nation. Pour les clubs de ping, du coup, l'analogie qu'il y a à faire irait plutôt du côté du football que du tennis: les clubs vont mettre à disposition leurs joueurs pour des compètes internationales.
Cela est à mettre en relation avec la structuration des instances de type International Table Tennis Federation (ITTF) et World Table Tennis (WTT). Ainsi, le président du conseil de la WTT est Liu Guoliang, ancien champion olympique et anciennement sélectionneur en chef de l'équipe de Chine. Il s'agit donc de structures fédérales, étatiques, et non de structures issues des clubs qui organisent le circuit mondial.
Or, ce sont les clubs qui sont le mieux à même de recruter des licenciés, et de faire venir le public. C'est en tout cas mon avis personnel. Dans l'idéal, les clubs devraient s'arranger pour créer des structures de supervision avec des représentants qui organiseraient le circuit international, permettant aux joueurs un calendrier, et une récupération idéale.
A cet égard, la réussite du WTT Champions Montpellier au niveau de l'affluence du public tend à prouver que c'est bien aux clubs qu'il faut donner ce pouvoir de supervision du circuit international, et non à des structures étatiques trop détachées du terrain. En conséquence, les joueurs participant au circuit international ne représenteraient plus leur pays, à l'exception des Championnats du monde, de la Coupe du monde et des JO, et pourraient avoir leur propre staff ou celui de leur club.