A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le treizième.
13. Trou de mémoire
Grendchko jeta un coup d’œil irrité à l’icône de Shinaen dont la couleur avait viré au rouge sur sa console. Le son strident de l’appel indiquait lui aussi l’urgence. Il ne restait que deux heures avant l’opération anti-réfractaires dont le secret était censé être absolu. Le Fengir lui-même n’était pas dans la discrétion, alors pourquoi Grendchko pressentait-il que le Premier Stratège allait lui parler du coup de filet ? Il prit l’appel. Le visage familier de Shinaen apparut. Le Fengir le dévisageait d’un œil froid.
« Nous aurions apprécié, cher Coordonnateur, que vous nous teniez informés de l’intervention concernant les Réfractaires à 18 h. Vous avez été jusqu’à présent un partenaire fiable. Maintenant, nous nous posons des questions.
– Excellence, j’ai souhaité garder le secret jusqu’au dernier moment dans le cas où nos échanges seraient interceptés.
– Nos échanges ne sont pas interceptés, fourrez-vous bien ça dans le crâne.
– J’ai voulu bien faire, Excellence. Trop bien faire peut-être. »
Le Fengir le considéra un instant comme s’il envisageait de faire de Grendchko son plat de résistance. Celui-ci baissa humblement les yeux. « Vous êtes informé du protocole, au cas où vous feriez des prisonniers ?
– Protocole ? répéta stupidement Grendchko, s’attirant le soupir exaspéré de son interlocuteur.
– Le protocole détaillé dans notre traité d’assistance mutuelle. Celui qu’ont respecté tous vos prédécesseurs.
– Je n’ai pas pris le temps de me renseigner à ce sujet. » Grendchko s’efforça d’adopter une mine contrite. Mieux valait que Shinaen le juge incompétent et demeuré plutôt qu’il ne choisisse de relever de l’impertinence dans ses paroles.
« Je vous joins le document. Mais au cas où vous seriez de nouveau trop occupé pour le lire, sachez que tous vos prisonniers doivent être transférés au noyau Sylko de la cité de Mustra. Les Guides Communiants et leurs Adeptes sélectionnés pour votre petite opération en sont déjà informés. Si vous tentez de vous y opposer, vous aurez affaire à moi. »
La communication coupa abruptement. Grendchko serra le poing et l’écrasa sur la table. Puis il jeta un coup d’œil à la porte de son bureau et imagina que l’un de ses assistants l’ouvre à cet instant. En tant que Premier Coordonnateur, il se devait d’afficher un calme et une maîtrise absolus, comme si rien n’était capable de l’atteindre. Son regard glissa sur divers bibelots décoratifs posés sur une étagère. Il s’en empara et les projeta tour à tour de toutes ses forces en direction de la porte — Premier Coordonnateur ou pas, il ne fallait pas trop lui en demander. Il poussa un cri aigu de frustration. S’il y avait bien une chose qu’il haïssait entre toutes, c’était qu’on lui fixe des limites à ne pas franchir, ou qu’on lui dicte sa conduite. Il savait, pourtant, devoir beaucoup trop aux Fengirs pour prendre le risque de se révolter. Son instinct lui disait que le rapport de force ne serait pas en sa faveur. Le moment n’était pas venu.
Encore tremblant de fureur, Grendchko commanda à un droïde de venir remettre ceux des bibelots qui n’étaient pas brisés à leur place, et de jeter les autres. Il joignit ensuite les différents intervenants, et reçut confirmation qu’ordre avait été donné de transférer tous les prisonniers au noyau Sylko. Quelques-uns des Guides Communiants montrèrent un vague malaise quand il les interrogea, mais Grendchko se contenta d’opiner comme s’il approuvait la directive. Après cela, il vérifia les ultimes préparatifs. Le moment venu, il enfila des lunettes de réalité virtuelle et se connecta au casque de l’un des commandos envoyés traquer les Réfractaires. Celui-ci était équipé d’une holocam permettant au commandement de monitorer l’opération en temps réel. Grendchko pouvait aussi, s’il le souhaitait, afficher le point de vue de n’importe lequel des recodrones ou droïdes d’assaut qui accompagnaient les Nadariens, ou faire apparaître en incrustation autant de fenêtres des participants que l’y autorisait son champ de vision. L’intervention avait été prévue dans des passages des Cavernes où n’étaient pas censé se trouver de communiants. Très vite, pourtant, le commando tomba sur un quidam. Devant sa mine effarée lorsque l’individu s’aperçut que l’on braquait un blaster sur lui, Grendchko fut presque tenté de demander au soldat de l’abattre. Il retint toutefois l’ordre. Plus les prisonniers seraient nombreux, plus ils auraient de chance de parler, et de livrer de nouveaux Réfractaires.
« Avons fait un prisonnier au secteur L3, annonça une voix dans son casque.
– Jeune homme capturé au secteur J7, fit un autre.
– Deux femmes d’âge mûr appréhendées au secteur B5. »
Comme les rapports se succédaient, les lèvres de Grendchko s’étirèrent en un sourire. Il tenait à ce que cette première opération soit une victoire éclatante, et les retours s’avéraient positifs. L’image en relief qu’il avait devant les yeux lui montrait une solide porte encastrée dans la roche. Un Nadarien qui devait être le Guide Communiant supervisant l’assaut s’en approcha muni d’un pass multifréquences, qui ressemblait à une simple carte. Il la passa, mais la fréquence se déroba à lui. Grendchko n’ignorait pas que dans l’ombre, se déroulait un affrontement quantique entre deux Intelligences Synthétiques, celle qui commandait au verrou de la porte et celle du commando. Les minutes s’écoulèrent sans que la porte ne s’ouvre.
« Détruisez-la », finit par ordonner Grendchko.
Faisceaux lasers et rayons ioniques se révélèrent inefficaces. Il fallut recourir à des explosifs spéciaux à base de denorium condensé pour finir par déformer le métal de tirinium, extrêmement résistant, et que la porte livre passage. Grendchko sauta sur le point de vue du premier commando à franchir le seuil. Le canon du blaster du soldat pointa pourtant vers le sol dès qu’il eut pénétré dans le couloir, et l’écran s’obscurcit. Grendchko voulut enchaîner sur le recodrone qui accompagnait l’homme, mais il avait été désactivé. Aucun autre soldat n’osait plus s’avancer dans le nouveau corridor.
Grendchko activa l’icône du drone détruit pour accéder aux dernières données sauvegardées. Grâce à la fonction image par image, il aperçut un canon multifrag fixé au plafond délivrer une première décharge, avant que la vision ne s’opacifie brusquement. Il jura. Sur place, le commando disposait des mêmes données, et des ordres fusaient.
Plusieurs droïdes offensifs durent être sacrifiés avant de parvenir à désactiver le canon. Comme les soldats s’avançaient, un nouveau tir de barrage en balaya quelques-uns. Cette fois, c’étaient des droïdes de combat adverses qui faisaient la preuve de leur efficacité.
Ecœuré, Grendchko passa sur un autre groupe d’assaillants, qui quant à eux se voyaient bloqués par une porte. Quand il suivit la progression d’un troisième commando, ce fut pour assister de nouveau à une série d’attaques de drones très agiles, difficiles à cibler. Leurs évolutions faisaient penser à un essaim en colère, et ils délivraient avec précision leurs salves laser. Tous les soldats n’avaient pas été équipés de champs de force, et plusieurs gisaient au sol.
Au fil de la soirée, la résistance s’accrut dans les Cavernes d’Ambre. Vint le moment où les forces de Grendchko durent battre en retraite dans certains corridors, pour se mettre à défendre à leur tour les accès. La situation avait atteint un point d’équilibre, mais les pertes étaient nombreuses. Grendchko grinça des dents. Il contacta celui des leaders dont la section avait le plus progressé. « Combien avez-vous capturé de Réfractaires ? demanda-t-il.
– Un seul, Premier Coordonnateur. On n’est pas sûr que ce soit un Réfractaire, vu qu’il n’était pas armé. Son identification est celle d’un chef ingénieur de la Transpulsion. » Grendchko eut un rictus de colère. Une seule prise, lui qui en voulait des dizaines ! Les lèvres tremblantes, il mit fin à la communication. Plusieurs icônes flottantes et clignotantes cherchaient désespérément à attirer son attention. Il choisit celle indiquant qu’il avait été tagué dans une publication devenue virale sur la Ruche. Halnev, le Premier Guide Communiant d’Argea en personne en était l’auteur. L’enregistrement de l’holovid le montrait fort courroucé.
« Vous avez sans doute été informé de l’opération spéciale d’aujourd’hui dans notre lieu le plus sacré, les Cavernes d’Ambre. Un coup de filet qui a été organisé au plus haut niveau sans mon accord — à mon insu, je vous l’affirme ici solennellement. Vous avez peut-être l’un de vos proches qui en a été victime, chers concitoyens. Je veux vous faire savoir que c’est aussi mon cas. Ma propre nièce a été interpellée de manière brutale, alors qu’elle circulait dans l’un des couloirs accessibles au public. » D’un geste théâtral, il activa l’enregistrement qu’avait fait sa nièce de sa capture. Des commandos flanqués de drones s’avançaient vers elle. Comme elle protestait vivement, un bruit mat retentit et elle poussa un cri de douleur.
Grendchko se prit la tête entre les mains, réalisant qu’il avait négligé d’ordonner à ses soldats de brouiller les communications des tablettes. De nombreux liens vers des vidéos du même ordre, prises dans la soirée, lui confirmèrent que l’enregistrement de la nièce du premier magistrat d’Argea n’avait rien d’un cas isolé. Un signal d’appel provenait justement de l’oncle en question. La nuit promettait d’être interminable.
***
Les murs étaient beiges, mais étrangement flous. Peu à peu, cependant, la vision gagnait en précision. Des carrés convexes tout autour — les parois étaient matelassées. Une lumière blanchâtre descendait du plafond, directement émise par la roche. La pièce était nue, entièrement vide à l’exception du lit sur lequel reposait Jaynak. La couche se révélait des plus sommaires, inconfortable, et quand il se redressa, Jaynak sentit des courbatures au niveau du dos.
Que faisait-il ici ? Et où était cet « ici » ? Il ne s’était pas endormi dans cette pièce, il en était certain. Il avait perdu connaissance, et ne reprenait conscience qu’à présent, à un moment où le besoin d’obal se faisait ressentir. Les mains jointes au niveau du front, il s’efforça de retrouver ses repères. Quel était son dernier souvenir ? Il y avait un trou dans sa mémoire, et lorsqu’il cherchait à l’examiner, tout tourbillonnait. Plutôt que de s’évertuer à forcer ceux de ses souvenirs qui persistaient à se dérober, il évoqua d’autres fragments moins rétifs. La victoire de Grendchko aux élections était un point de repère, douloureux certes, mais utile. La soirée avec son frère Merek n’était pas non plus plaisante à revivre, comme si son esprit prenait un malin plaisir à se concentrer sur des choses négatives. Dans le même registre, il y avait eu, aussi, cette convocation à la caserne d’Eglev, conséquence directe de la soirée avec son frère, et de l’intervention d’un Fengir. Mais que s’était-il passé après ? Les murs se remirent à tournoyer.
Jaynak ferma les paupières. Si chercher à se souvenir lui faisait cet effet, autant éviter pour le moment. L’aspect dénudé des lieux faisait penser à une cellule. Peut-être une geôle militaire, et dans ce cas, sa présence ici pouvait avoir un lien avec sa brève visite à la caserne d’Eglev. On lui avait pris sa tablette en tout cas, il n’avait donc aucun moyen de joindre le monde extérieur. L’angoisse avait remplacé la surprise initiale, elle se diffusait dans sa poitrine. Il se leva, et fit le tour de la pièce. Aucune issue, nulle fenêtre, uniquement ces parois rembourrées, destinées de toute évidence à prévenir toute tentative de suicide. Il y avait peut-être une holocam quelque part, mais camouflée ou miniaturisée de manière à ce qu’il ne puisse l’apercevoir.
Jaynak s’approcha d’un mur et se mit à tambouriner — aucun son. « Hey ! cria-t-il. Je suis éveillé ! Il n’y a personne ? »
Ses cris ne trouvèrent aucun écho. Il refit le tour de la pièce avant d’aller s’asseoir sur le lit rudimentaire. Le temps était comme figé. Peut-être passait-il, mais Jaynak n’avait aucun moyen de le savoir. La privation de repères, de liquide et de poudre primordiale était une méthode de torture, il ne l’ignorait pas. C’était pourtant absurde, il avait beau fouiller sa mémoire, il ne trouvait aucun acte susceptible de justifier sa présence ici. A moins bien sûr, qu’on ne le juge que sur ses seules pensées, et sur la piètre opinion, par exemple, qu’il avait de Grendchko. Nul de ses appels, en tout cas, ne paraissait être entendu.
Jaynak se leva, fit quelques exercices physiques et autres étirements, accomplit plusieurs tours du minuscule périmètre et se rassit. Un peu plus tard, il passa en revue le moindre centimètre carré de sa cellule, sans trouver aucun point faible. Il s’allongea alors et évoqua sa sœur Niducia, ses frères Merek et Aljay, les jumeaux. Les visages de son père Okar et de sa mère, Veka, lui apparurent, plongés dans l’affliction après la mort d’Aljay. Son oncle Irkouk lui souriait à sa manière débonnaire. Jaynak était-il le nouveau Aljay dont les siens allaient devoir porter le deuil ? A cette idée, son estomac se noua.
Les Nadariens avaient la faculté de se tenir debout, immobiles contre une paroi de roche en modifiant les propriétés magnétiques de leur corps. Cela favorisait la détente et la méditation. Un tel privilège lui était interdit ici, avec ces fichues parois. A cet instant, un chuintement qui, en temps normal, lui aurait paru discret déchira l’absolu silence de la cellule. Parfaitement camouflée dans l’un des murs, une porte venait de glisser, laissant le passage à un Fengir. Le pelage brun rayé d’ocre, de petite taille en comparaison de ses congénères, l’individu était vêtu d’une blouse blanche. Sur son épaule, il avait un dispositif en deux parties dont Jaynak ignorait la nature. Le Fengir approcha du visage de Jaynak l’une de ses mains. Une griffe acérée en jaillit, qu’il pointa tout près du cou de Jaynak. « Vous allez vous laisser faire, feula-t-il. Sinon, il y aura des conséquences. »
La langue de Jaynak resta coincée sur son palais. Il se contenta de hocher la tête. Le Fengir prit le dispositif sur son épaule, et appuya sur un bouton. L’appareil devait être capable de générer ses propres champs magnétiques, car lorsque le Fengir plaça la plaque qui composait la partie inférieure de l’engin sur la poitrine de Jaynak, elle y demeura collée. Reliée par divers fils, la section supérieure était une calotte cybernétique que le scientifique positionna sur le crâne de Jaynak. Celui-ci sentit aussitôt des piqûres entre ses plaques crâniennes.
« Répondez à ces questions, fit le Fengir d’un ton froid. Tout mensonge sera sévèrement sanctionné. Quels sont vos derniers souvenirs, avant de vous retrouver ici ? »
Jaynak lui décrivit les différents épisodes, celui de la salle de jeu en compagnie de Merek, de son atelier à la Transpulsion suivi de la convocation à la caserne d’Eglev.
« Aucun autre souvenir récent ? »
Jaynak fit « non » de la tête.
« Avez-vous été en contact avec un Réfractaire récemment ? »
Jaynak ouvrit la bouche, surpris. « Pas à ma connaissance. »
Le regard du scientifique se fixa sur un point dans l’espace. Le Fengir était visiblement un Augmenté. Il devait se connecter à l’appareil placé sur Jaynak pour déterminer si celui-ci mentait. Son examen des données parut le satisfaire. Il s’avança vers Jaynak, appuya sur un autre bouton de l’appareil et retira les deux sections tour à tour.
« Pourrais-je avoir de l’obal ? Vous n’allez pas me laisser mourir de faim.
– Patientez. »
Jaynak crut distinguer une lueur ironique dans les minces fentes qui tenaient lieu de pupilles. Le Fengir se dirigea vers la porte, qui se referma derrière lui. Jaynak se demanda pourquoi il n’en avait pas profité pour se ruer vers l’ouverture, tant qu’il était encore en état de le faire.
Il secoua la tête. La griffe si pointue avait été un avertissement, l’ignorer eût été périlleux. Il se rapprocha néanmoins de la paroi par laquelle était ressorti le scientifique. Il se mit à palper le mur. En enfonçant ses doigts en différents endroits, il parvint à déceler une fente qui correspondait à l’embrasure. Jaynak ne pouvait cependant la toucher, et ne disposait d’aucun outil pour l’atteindre. Exercer différentes pressions ne produisit aucun effet. De guerre lasse, il finit par aller se rasseoir sur son lit.
Le Fengir lui avait parlé d’un Réfractaire, et Jaynak avait été sincère quand il disait n’en avoir aucun souvenir. Etait-ce donc la raison de sa présence ici ? Les privations qu’on lui faisait subir trouvaient leur explication. Il avait été victime d’un malentendu, d’un horrible malentendu. Jaynak brûlait de crier son innocence, mais se retint. Il connaissait le caractère suspicieux des Fengirs. S’il tentait de se disculper, il ne ferait qu’attiser leur méfiance. Dans la vie, être sur la défensive apportait nettement moins de récompenses que de passer à l’offensive.
Son esprit commença à dériver dans un début d’accablement qui ressemblait à une sombre rêverie. Il s’était mis à dodeliner de la tête quand la porte s’ouvrit de nouveau. Jaynak écarquilla les yeux. La figure patibulaire de l’individu qui s’avançait dans la pièce d’un pas assuré, l’expression goguenarde de son visage, cette carrure d’ancien lutteur ne pouvaient appartenir qu’à Grendchko, le nouveau Premier Coordonnateur. Il était accompagné d’un Fengir qui l’éclipsait par la taille et la prestance. Richement vêtu, les muscles saillants, la fourrure fauve, il le considérait avec gourmandise. Il devait s’agir d’un personnage très influent chez les Fengirs, mais comme ces derniers restaient dans l’ombre des instances dirigeantes, Jaynak ignorait son identité.
Grendchko prit la parole. « Si vous êtes encore en vie, si je n’ai pas mis votre tête au bout d’une pique pour l’exhiber dans la Ruche, c’est que d’après le Premier Stratège Shinaen, vous avez fait le bon choix. Bien que vous ayez été retrouvé, de manière extrêmement suspecte, dans les profondeurs des Cavernes d’Ambre, vous auriez décidé de ne pas rejoindre les Réfractaires.
– Pour une raison inconnue, dit le Fengir qui devait, d’après les indications de Grendchko, se nommer Shinaen, les données vous concernant ne sont que très fragmentaires. Mais nous savons au moins cela avec certitude.
– J’ignore de quoi vous parlez. Vos Excellences.
– Oui, votre “trou de mémoire”, dit Grendchko. J’en ai été informé. Il explique sans doute cette fâcheuse fragmentation des données. Très pratique, si vous voulez mon avis. Votre famille s’est émue de votre sort, ainsi que vos collègues de travail. Les avez-vous oubliés, eux aussi ?
– Non, Votre Excellence.
– Après délibération avec mes différents adjoints, nous avons décidé de mettre votre loyauté à l’épreuve.
– Ma loyauté ? Mais j’ai un travail. Je prouve tous les jours ma loyauté envers l’Expansion par mon travail. » Grendchko s’avança et lui asséna une gifle retentissante. L’onde de douleur perfora celui des cerveaux de Jaynak affecté aux sensations. Dans son sillage, il ressentit une brûlure au niveau de la joue.
« Vous vous plaisez ici ? » demanda onctueusement Shinaen.
Jaynak secoua la tête.
« Dans ce cas, fit Grendchko, je vous conseille d’accepter le Stage de Remise sur la Voie que nous vous proposons. »
Jaynak, tout en se frottant la joue, regarda son interlocuteur d’un air incrédule. Il s’apprêtait à demander des détails quand Grendchko lui heurta la poitrine de l’index. « Sans poser la moindre question. »
Jaynak demeura un instant interloqué, avant de bredouiller son acquiescement.
« Signez ce document », dit Grendchko en faisant apparaître, d’un simple geste sur sa tablette, un holo-formulaire.
Au moment de signer, Jaynak eut l’impression de vendre son âme.
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