C'est un paradoxe : au moment où je lisais le septième tome de l'Epée de Vérité, de Terry Goodkind, un auteur traditionnellement édité, je suis tombé sur un passage des Piliers de la Création qui correspond parfaitement à la philosophie que je mets derrière l'autoédition. Je n'irais pas jusqu'à en conclure que les auteurs autoédités sont eux-mêmes des piliers de la création, mais dans ce contexte, j'avoue que c'est assez amusant.
Oui, oui, oui, je sais. Vouloir détourner les paroles d'un auteur pour l'attribuer à une idéologie ou un dogme, c'est le Mal. Le philosophe Friedrich Nietzsche aurait-il apprécié de voir une partie de ses concepts détournés et repris à son compte par le parti Nazi, je ne crois pas.
De la même manière, le romancier de Fantasy Terry Goodkind n'aimerait sans doute pas qu'on lui attribue des pensées liées au mouvement de l'autoédition.
Donc, que les choses soient claires: l'analogie entre ce passage d'un roman de Terry Goodkind et la philosophie de l'autoédition n'est qu'une vision personnelle. Cela correspond à l'idée que je me fais de l'autoédition.
Et moi, Alan Spade, ne prétend aucunement représenter l'autoédition. Ce mouvement, par ailleurs très ancien, puisque Denis Diderot lui-même s'autoéditait, ne peut être défini ou limité par les pensées ou élucubrations d'un seul. De nombreux auteurs autoédités vous diront sans doute en commentaire qu'ils ne sont pas d'accord avec ma vision, et c'est aussi toute la richesse de ce mouvement dans lequel je m'inscris.
Ceci posé, voici le passage en question (la traduction est de ma pomme, puisque je lis l'ouvrage directement en anglais): "Si vous voulez être un esclave dans la vie, alors continuez à aller de-ci de-là en demandant aux autres de faire les choses à votre place. Ils vous rendront service, mais vous vous apercevrez que le prix est vos choix, votre liberté, votre vie elle-même. Ils feront à votre place, et au final vous serez réduit en esclavage pour toujours, ayant fait don de votre identité à un prix dérisoire. Alors, et seulement alors, vous ne serez personne, un esclave, parce que vous-même et nul autre l'avez voulu ainsi."
Des paroles fortes. Si je bâtissais un temple à la gloire de l'autoédition, ce sont sans doute ces paroles que je graverais sur le frontispice. Je reconnais qu'elles peuvent aussi être valables, dans une certaine mesure, pour l'édition traditionnelle -- de nombreux auteurs traditionnellement édités ne seraient pas arrivés où ils en sont s'ils n'avaient pas su prendre en main leur destin.
Une traduction pouvant être détournée, voici les paroles originales: "If you want to be a slave in life, then continue going around asking for others to do for you. They will oblige, but you will find the price is your choices, your freedom, your life itself. They will do for you, and as a result you will be in bondage to them forever, having given your identity away for a paltry price. Then, and only then, you will be a nobody, a slave, because you yourself and nobody else made it so."
Comme je le disais, l'autoédition existe depuis toujours, mais ces paroles de Terry Goodkind, ont, pour moi, fait particulièrement écho à l'essor de l'autoédition sous format ebook depuis 2009, suite à la sortie de la liseuse Kindle en 2007. Une autoédition à l'américaine, où effectivement, on ne laisse plus faire à la place, et pour laquelle chaque livre représente en quelque sorte une parcelle à revendiquer, dans cette ruée vers l'Ouest sauvage des lettres.
Et si vous me dites que les choses n'étaient pas d'emblée aussi pures, notamment parce qu'Amazon, l'inventeur du Kindle, n'a proposé 70% de droits sur les ebooks (royalties d'auteur) que pour s'aligner sur ce que proposait déjà Apple, je suis d'accord.
Si vous me dites que les choses ne sont pas restées aussi pures depuis qu'Amazon s'efforce d'obtenir l'exclusivité de publication des auteurs autoédités sur sa plate-forme (programme Kindle Select), je suis également d'accord.
Les choses sont rarement toutes blanches ou toutes noires.
Il n'empêche que pour moi, l'esprit de départ, ce qui a présidé à ce mouvement, se retrouve dans cette citation de Terry Goodkind.
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