vendredi 10 octobre 2014

[Archive 20 décembre 2008] Le syndrome de l'oisillon

Nous autres auteurs sommes victimes de toutes sortes de syndromes. Peur de diffuser ses écrits, difficulté à les porter au-devant du public, c'est à dire à les promouvoir (nous ne sommes clairement pas les mieux placés pour cela), repli sur soi... Le syndrome de l'oisillon, finalement, n'est peut-être que l'une des innombrables variantes du même problème.

C'est de notoriété publique, entre la multiplication du nombre d'auteurs et la raréfaction des éditeurs ayant accès aux grands réseaux de distribution, il est de plus en plus difficile pour un inconnu de se faire publier de manière satisfaisante. J'ai naturellement tendance à regarder les choses du point de vue de l'auteur, mais il peut être intéressant d'examiner les conséquences qu'une telle situation peut avoir pour un éditeur. En particulier un petit éditeur, puisque finalement, un inconnu comme moi aura le plus de chances de se faire éditer via un petit éditeur. La difficulté de la recherche étant ce qu'elle est, le risque est de croire, en tant qu'auteurs, que si nous trouvons un éditeur à compte d'éditeur, quelle que soit sa taille, nous aurons décroché le gros lot. Et donc, de se dire que c'est gagné et de nous reposer entièrement sur cet éditeur pour tout ce qui est promotion,  diffusion, valorisation de l'oeuvre, en plus des aspects traditionnels de relecture/correction et choix d'une illustration de couverture. C'est ce que j'appelle le syndrome de l'oisillon, qui veut que les auteurs attendent, le bec ouvert, que les choses leur arrivent toutes cuites une fois édités. Voilà ce que c'est de considérer avoir accompli l'essentiel du travail une fois le livre écrit et l'éditeur trouvé... Ce syndrome va générer à l'évidence un surcroît de travail pour l'éditeur, non seulement de par le défaut d'engagement de ses auteurs, mais aussi de par la multiplication du nombre d'auteurs en regard du nombre d'éditeurs à compte d'éditeur. Double impact, donc, et des petits éditeurs qui croulent sous le boulot dans une situation concurrentielle qui leur est forcément défavorable à cause du système des offices des plus grands éditeurs.

On peut en fait diagnostiquer une triple mauvaise répartition : mauvaise répartition du nombre d'auteurs parvenant à trouver un éditeur, trop nombreux étant ceux à rester sur le carreau, mauvaise répartition du travail d'édition, trop de choses reposant sur les épaules d'un seul éditeur, et enfin, mauvaise répartition du revenu d'auteur, puisque de 8 à 10%, c'est trop faible pour un auteur, particulièrement si ce dernier accepte de mettre la main à la pâte pour tout ce qui est promotion/diffusion/recherche d'un imprimeur concurrentiel, etc.

En ce sens, je crois que la "sélection naturelle" du marché devrait amener les auteurs, de plus en plus, à mener un travail proche de celui d'éditeur. On se rend compte que c'est déjà ce que font pas mal d'auteurs édités par de petites maisons (ne serait-ce que le fait de publier un blog fait partie de l'arsenal promotionnel).

C'est mon avis, mais peut-être qu'il y a cinquante ans, on tenait déjà le même discours...

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